Trans-Atlantique
de Witold Gombrowicz

critiqué par Pucksimberg, le 10 juillet 2020
(Toulon - 44 ans)


La note:  étoiles
Des Polonais en Argentine
« Trans-atlantique » pourrait s’apparenter à une autofiction dans laquelle Gombrowicz, parti vivre en Argentine durant l’une des périodes les plus tendues du XXème siècle, décrit le microcosme polonais qui se retrouve en Amérique du sud. Il se retrouve confronté à des personnes très fières d’être polonaises et qui souhaitent porter haut le drapeau du pays. Il se voit aussi mêlé à une histoire quelque peu rocambolesque lorsqu’un certain Gonzalo tombe amoureux du fils de Tomasz, un homme respectable. Ce Gonzalo lui demande de l’aider dans sa démarche de séduction qui prend des allures quelque peu loufoques. Scènes de repas, scènes de duel, situations burlesques sont des moments-clés dans ce roman, qui fait sourire, tout en faisant réfléchir.

En effet, il est souvent question du Père ( Tomasz ) et du Fils ( Ignace ), qui peuvent métaphoriquement symboliser les questionnements de l’écrivain, sur la fidélité au passé avec la figure paternelle, ou bien la possibilité de s’affranchir de l’héritage polonais et de vivre différemment. Derrière des situations amusantes, il y a souvent chez Gombrowicz une réflexion. L’écrivain, lui-même, n’est pas bien libre dans ce roman et est souvent contrôlé par d’autres individus. Ces interrogations identitaires sont intéressantes.

Gombrowicz a revisité un genre littéraire polonais classique, la gaweda, dans son roman. Cette forme littéraire adaptée au contexte du XXème siècle est quelque peu original. Par exemple, cela autorise à mettre une majuscule à des mots en plein milieu d’une phrase, ce qui peut surprendre, mais le lecteur s’y habitue très vite. De plus, le roman ne s’affirme pas par son réalisme. Certaines situations rappellent quasiment les contes voltairiens. Pour apprécier ce roman, il faut accepter d’entrer dans un récit parfois farfelu, mais qui n’est pas exempt de réflexions. Le style de l’écrivain est toujours très vif et accrocheur. On a parfois le sentiment de retrouver le rythme d’une discussion dans sa façon de narrer. En s’inspirant d’une forme ancienne, forcément l’histoire a parfois quelque chose de daté, pourtant elle parle bien du monde contemporain.

l est un passage qui m’a particulièrement plu c’est celui qui est inspiré de l’écrivain Borges. Gombrowicz a transposé un de ses souvenirs où il a rencontré le grand écrivain argentin. Cette scène ne met par forcément en avant le grand auteur …

Ce roman est original, plutôt amusant, mais possède tout de même un côté suranné. Le roman n'est pas dépourvu pour autant de charme.