Un été brûlant
de Tim Pears

critiqué par Fanou03, le 16 juin 2020
(* - 48 ans)


La note:  étoiles
En attendant la pluie
Un livre vient à vous parfois par son titre qui vous interpelle ou vous intrigue, mais parfois aussi par sa couverture : ce fut le cas en ce qui me concerne avec Un été brûlant de Tim Pears. Sur cette couverture on y voit une jeune fille dans un champ récemment moissonné, vêtue des attributs de l’adolescence décontractée. Short en jean effrangé, chemise sans manche, elle est légèrement de côté, penchant sa tête pensivement, avec mélancolie peut-être, tenant dans sa main un brin de paille. L’image est retraitée avec des tons ocre et des nuances orangées. Cette couverture est une admirable évocation du contenu du livre.

Un été brûlant est en effet un superbe roman d’ambiance, languide comme le sont les étés caniculaires plein d’ennui, de chaleur et de soif. Tout semble s’être figé dans un long étirement du temps. Le récit, contrairement à ce que le laisse présager le titre français de l’œuvre, se déroule en effet en de septembre à octobre; les jeunes gens traînent leur désœuvrement, car l’école n’a pas repris dans cette Angleterre plongée dans une grève générale du début des années 1980. L’œuvre cultive ce temps immobile : rien ne progresse vraiment, d’autant plus que les chroniques du temps passé, évoquées notamment par la grand-mère d’Alison, alternent avec les chroniques du temps présent, cultivant une sorte d’intemporalité.

Le livre est aussi et surtout la description des hommes et des femmes qui gravitent autour de la narratrice, Alison Freemantle : par petites touches elle va ainsi croquer les personnalités des membres de sa famille, et celles de quelques autres habitants du village, comme Douglas Westcott, Maria de Graça, ou encore le Pasteur. Avec une grande douceur elle affleure leurs secrets et leurs âmes. Mais Alison mais n’est pas omnisciente : le mystère de ces êtres restent le plus souvent entiers. C’est qui est le plus beau sans doute dans ce roman (on ne saura ainsi jamais vraiment pourquoi le père d’Alison est comme retombé en enfance). On y décèle aussi la lente transformation d’Alison de son état de jeune fille à celui de jeune femme.

L’écriture de Tim Pears est ciselée et profonde. Le chapitre « Géographies de l’inconscient », dédié à l’enfance du mystérieux Douglas Westcott est à ce titre très caractéristique. Même si l’on peut regretter que l’œuvre ne soit pas un peu plus rythmée et guidée par un scénario plus marquée, Un été brûlant, délicat et sensible, offre donc un très beau moment de littérature.