Je reste ici de Marco Balzano

Je reste ici de Marco Balzano
(Resto qui)

Catégorie(s) : Littérature => Européenne non-francophone

Critiqué par Septularisen, le 25 mai 2020 (Luxembourg, Inscrit le 7 août 2004, 56 ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (13 083ème position).
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QUAND LA PETITE HISTOIRE SE MÊLE A LA GRANDE!

Trina est une jeune fille espiègle et douce âgée de dix-sept ans. Contrairement à ses parents qui sont d’humbles paysans montagnards, elle est très instruite, va bientôt passer son BAC, son rêve étant de devenir institutrice. Malheureusement pour elle, elle habite à Curon, en Italie du Nord, plus précisément au Tyrol du Sud, dans le Trentino Alto Adige, à la frontière avec l’Autriche et à quelques encablures de la frontière Suisse. D’ailleurs, elle parle exclusivement l’allemand. En effet, par les « circonvolutions » de l’histoire, après la Première Guerre Mondiale, cette région a été rattachée à l’Italie.

Et malheureusement aussi pour elle, nous sommes en 1923, et le dictateur italien Mussolini, a décidé de gré ou de force «d’italianiser» la région! Il interdit donc la langue allemande, et italianise les noms des habitants, des rues, des commerces... Trina voit donc le rêve de sa vie s’écrouler, car elle ne peut enseigner…Littéralement «dépossédée» de sa propre langue! Pire encore, non seulement une épuration se met en place, avec des brimades quotidiennes, mais les fascistes relancent un projet abandonné des années auparavant, construire un immense barrage pour produire de l'électricité. Barrage qui entraînerait la disparition, l’engloutissement du village et de tous les alpages environnants par l'eau.

Bientôt, la Deuxième Guerre Mondiale se profile à l’horizon. La région toute entière se retrouve prise en étau par la politique. D’un côté les nazis allemands qui proposent aux habitants d’émigrer en Allemagne, de l’autre les fascistes italiens, qui leurs proposent de rester, avec le risque s’être incorporé dans l’armée italienne et de devoir aller se battre.

Le petit village se retrouve alors divisé en deux camps : ceux qui partent et ceux qui restent envers et contre tout sur la terre de leurs ancêtres…

Alors, en prolégomènes disons tout d’abord que tout ce que je pourrais ici écrire, et tous les mots que je pourrais ici utiliser ne suffiront pas à refléter l’immense beauté de ce livre et de sa traduction tout en finesse et en nuances de Mme. Nathalie BAUER.

Les personnages sont magnifiques, très bien rendus, et très fouillés psychologiquement, et on s’attache très vite à eux, même les plus durs, même les plus vils. On les sent vivre, on est avec eux dans leurs bonheurs comme dans leurs malheurs, et des malheurs il y en aura, croyez-moi!

C’est un livre triste, très triste même, écrit dans un style simple, très dépouillé et qui est en fait composé des lettres que Trina écrit (je ne vous dirais pas à qui pour ne pas vous divulgâcher le livre…), et qui nous replonge dans ces terribles années de guerre. C’est très descriptif et on s’y croirait vraiment, les alpages et les vaches en train de paître apparaissent vraiment devant vos yeux, et vous avez froid aux pieds quand les héros marchent dans la neige!

L’écriture est belle, sensible, imagée, pudique, tout en finesse et sentiments… Rien à redire, cela se lit comme de l’eau qui coule et que l’on boit!... Mais tout est beau dans ce livre, croyez-moi, même les scènes les plus rudes et les plus horribles (et il y en a aussi…), sont restituées de façon magnifique!

Je termine la lecture sur le c*l! C’est vraiment un livre magnifique, immense, qui m’a vraiment, mais vraiment beaucoup touché! Deux cent pages de pur bonheur. Une cure de jouvence et de fraîcheur littéraire! Je dirais que je l’ai «dévoré» ne pouvant utiliser que cette métaphore, parce que sinon j’aurais utilisé le mot «léché», tellement c’est beau!
Je ne peux, en conclusion, vous dire qu’une seule chose : c’est, et de loin, le meilleur livre que j’ai lu depuis très longtemps! Et, je sais que je le dis souvent, mais si je n’ai qu’un seul livre dont vous recommander la lecture cette année…

P.S. : «Je reste ici» a été lauréat en 2019 en France du prix «Méditerranée» étranger et en Italie du prix Bagutta, ainsi que finaliste du prestigieux prix «Strega» 2018.
La photo de couverture est réelle, elle représente le clocher de l’église du village de Cuoron (Trentino Alto Adige), - dont le triste sort est évoqué dans le livre, puisque celui-ci est basé sur des faits réels, bien que méconnus du grand public, les personnages sont eux par contre totalement fictifs -, qui est la seule chose qui émerge encore aujourd’hui des eaux du lac artificiel créé en 1950, à la suite de la construction du barrage. C’est devenu aujourd’hui un lieu touristique.

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Les éditions

  • Je reste ici [Texte imprimé] Marco Balzano traduit de l'italien par Nathalie Bauer
    de Balzano, Marco Bauer, Nathalie (Traducteur)
    10-18 / 10-18
    ISBN : 9782264074454 ; 7,50 € ; 14/08/2019 ; 216 p. ; Poche
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Les injustices de l'histoire

8 étoiles

Critique de Pascale Ew. (, Inscrite le 8 septembre 2006, 56 ans) - 3 novembre 2020

Quand on mène une vie simple dans un village autrichien, comment peut-on imaginer être annexés par un pays étranger qui vous oblige à parler une langue inconnue, puis être menacés d’expulsion par la construction d’un barrage hydraulique, par des nazis, etc. ?
Trina veut devenir institutrice et mène une vie heureuse avec ses deux meilleures amies, à la fin de la première guerre mondiale. Hélas, son village, Curon, est annexé par l’Italie et on l’empêche d’exercer son métier...
Au cours de toutes ces années, les habitants sont sans cesse ballottés par les aléas de l’histoire, sans cesse à se demander s’ils doivent quitter, fuir ou résister coûte-que-coûte, s’accrocher à leur terre qui est tout pour ces paysans. L’incertitude règne en maîtresse.
L’auteur nous fait sentir combien la manière dont ces habitants ont été traités est révoltante, cruelle. Amateurs de happy end, passez votre chemin...

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