Le populisme en Europe centrale et orientale
de Roman Krakovsky

critiqué par Colen8, le 10 janvier 2020
( - 82 ans)


La note:  étoiles
Une longue histoire
Le rejet des modèles de démocratie parlementaire libérale prévalant dans les pays de l’Ouest européen par ceux d’Europe centrale et orientale s’était déjà exprimé avant les désastreux traités de 1919-1920 qui n’auront servi qu’à l’amplifier. Les raisons que détaille très justement Roman Krakovsky tiennent à des différences dont il faut avoir conscience pour comprendre le fossé creusé de nos jours au sein des membres de l’UE sur les missions et le devenir de celle-ci. Un écart de développement politique, économique et culturel préexistant au premier conflit mondial s’est fortement aggravé entre vainqueurs et vaincus :
- Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes a été allègrement bafoué pour prévenir toute velléité d’émergence d’une puissance centrale concurrente des vainqueurs, créant des états hétérogènes découpés selon des frontières arbitraires après la dissolution des empires multiethniques et multiconfessionnels du début du siècle, allemand, ottoman, austro-hongrois et la révolution bolchevique en Russie.
- Les indemnités colossales exigées des vaincus a entravé leur développement industriel déjà très en retard, a affaibli de courtes tentatives de démocratie, a ouvert la voie à des dictatures républicaines et monarchiques prônant la pureté de la race à travers un nationalisme exacerbé, enclin aux discriminations envers les minorités, favorable à l’eugénisme et l’antisémitisme jusqu’à l’arrivée d’Hitler au pouvoir en 1933.
Après 1945 il faut se souvenir des millions et des millions de déplacés d’Europe centrale et orientale devant ramener des groupes ethnolinguistiques homogènes au sein de leurs frontières nationales. En même temps une réaction de gauche qui les a fait basculer légalement ou non dans le camp communiste jusqu’à la chute du mur de Berlin en 1989 les a maintenus sous des régimes totalitaires violemment répressifs. Ce fut une erreur de penser qu’ensuite la démocratie s’y imposerait d’elle-même car à la fois les menaces identitaires perçues avec ou sans fondement et le retard pris dans la modernisation ont assez vite ramené au pouvoir des gouvernements définissant leurs démocraties comme « illibérales » teintées de dérive autoritaire. Il y a là une leçon à méditer.