Le Pape terrible, tome 4 : L'amour est aveugle
de Alejandro Jodorowsky (Scénario), Theo Caneschi (Dessin)

critiqué par Septularisen, le 4 janvier 2020
(Luxembourg - 56 ans)


La note:  étoiles
DELLA ROVERE, DERNIER ACTE!
L’histoire de ce quatrième et dernier volume de la «biographie » du Pape Jules II, par M. Alejandro JODOROWSKY (*1929), s’ouvre le 21 février 1513, sur… l’enterrement de Jules II, dont la bière est portée, entre autres, par MICHELANGE (Michelangelo BUONARROTI 1475 - 1564) et RAPHAËL (Raffaello SANZIO 1483 - 1520) , qui ne trouvent d’ailleurs rien d’autre à faire, à ce moment-là, que de revendiquer chacun le « titre » de mignon préféré du défunt Pape.

Comme pour le volume précédent, c’est par le récit de MACHIAVEL (Niccolò MICHIAVELLI 1469 - 1527), le stratège et philosophe préféré de Jules II, que nous sont racontés les derniers mois du «Pape terrible». Celui-ci veut organiser un nouveau conclave, en l’église Saint-Jean-de-Latran, afin de faire excommunier tous les cardinaux qui ont essayé de le destituer au motif de sodomie! Jules II estime en effet que ceux-ci sont à la botte de son ennemi juré : le Roi de France, Louis XII (1462 – 1515), qui voudrait se faire couronner empereur d’Italie.
Machiavel essaye de l’en dissuader. En effet, Louis XII n’ayant cessé de le dénigrer, des prêtres et la foule hostiles projettent de l’assassiner au moment même où il consacrera l’hostie.
Grâce à l’aide du génial Léonard de Vinci et à un «dispositif» mis au point par celui-ci, Jules II, qui vient de faire un «miracle », parvient à restaurer le pouvoir du Vatican et se prépare à entrer en guerre sainte contre Louis XII pour le chasser d’Italie.

Furieux de ce revirement de situation, Louis XII décide d’envoyer son cousin, le jeune Gaston de FOIX-NEMOURS (1849 - 1512), comme émissaire auprès de Jules II. Sa mission : Séduire par son charme juvénile Jules II, et ainsi le persuader de signer un traité de paix…

M. JODOROWSKY semble ici avoir dépassé les limites de sa propre imagination, pour nous offrir une histoire digne des plus grands thrillers américains. Le scénario est très imaginatif et bien ficelé. Rien ne l’arrête, pas même le fait de s’offrir quelques «libertés» avec l’histoire (et non Gaston de FOIX n’est pas mort à Rome, mais à Ravenne...), il se paye même le «luxe» de nous offrir une fin avec un spectaculaire «twist»! (Non, n’insistez pas, je ne vous dirai pas lequel !..). C’est tout en démesure, en grandeur, en grandiloquence, un peu comme si le scénariste italo-chilien s’était fixé comme objectif de faire encore plus excessif que dans ses précédents volumes…

Les dessins de THEO (de son vrai nom Theo CANESCHI *1973) sont dans l’exacte ligne du scénario de M. JODOROWSKY, flamboyants, tout en excès et en exagération. Ils «servent» littéralement le scénario, et ce malgré un découpage des plus classiques, qui ne se permet que quelques fantaisies que lors des scènes de sexe (Voir Pgs. 34-37) ou de bataille P. ex. (Pgs.42-49).
Le dessin est beau, - servi il est vrai, par de magnifiques couleurs rouges-jaunes -, bien fini, avec une très belle profondeur. Les personnages se reconnaissent bien, les visages sont admirablement bien dessinés, surtout quand ils reflètent les sentiments des personnages. Seul bémol, comme toujours, les visages et les personnages vus de loin, mal finis, «fumés», mal ou alors incomplètement dessinés (Pgs.17, 21/22, 25, 42/19…), un peu comme si le dessinateur se disait qu’il font partie du décor, et que donc, rien ne sert de bien les travailler!

Je termine cette série sur une note positive. On aurait certainement pu faire mieux, mais cela n’était sans doute pas le but recherché par M. JODOROWSKY, puisque celui-ci a clairement dit qu’il voulait dénoncer dans cette série de BD (qui inclut aussi la série BORGIA sur le pape Alexandre VI et déjà critiquée sur CL), les comportements «indignes» de leur fonction de certains Papes du passé et raconter une autre facette de leur biographie. Il estime en effet que l’histoire officielle a été bien trop «expurgée», pour leur redonner un lustre qu’ils n’ont malheureusement pas eu! En cela, sans aucun doute, cette BD est une grande réussite!

P.S . : Comme pour les volumes précédents, en raison des scènes de sexe et de violence très crues et très explicites, ce volume est à réserver à un public adulte et averti!