Le voluptueux inquiet
de Ménécée

critiqué par Débézed, le 23 novembre 2019
(Besançon - 76 ans)


La note:  étoiles
De la sérénité à la volupté
Il ne reste que très peu d’écrits du philosophe grec Epicure, éponyme d’une philosophie dont la théorie est énoncée en quatre points dans le principal texte de lui qui nous est parvenu : « La lettre sur le bonheur » qu’il a adressé à son disciple Ménécée. Aucune réponse à cette lettre n’était connue jusqu’à ce que Frédéric Schiffter traduise une lettre soi-disant récemment trouvée dans des fouilles près d’Ankara, ou peut-être qu’il l’a tout simplement rédigée lui-même. Peu importe l’origine du document, l’essentiel est de découvrir ce que Ménécée, ou celui qui a écrit à sa place, a apporté comme réponse au grand philosophe, comment il a argumenté pour contredire, les quatre principes de ce qui est devenu l’épicurisme.

Epicure invite son ami à mener une vie simple, sans excès, ni ambition démesurée pour atteindre l’ataraxie, la sérénité que chaque être humain espère connaître. Il lui enseigne comment éviter les pièges dans lesquels tombent trop facilement les « voluptueux inquiets », ceux qui se laissent tenter par la plaisir et la débauche. Sa théorie se résume en quatre pointes : « ne pas craindre les dieux, ne pas craindre la mort, faire le tri de nos besoins et de nos envies pour ne satisfaire que ceux qui sont nécessaires à notre corps et profitables à notre équilibre, savoir agir avec discernement dans un univers hasardeux en tenant compte de nos expériences ». Schiffter/Ménécée argumente successivement sur ces quatre points en essayant de démontrer que le respect de ces quatre principes n’offre aucune garantie pour atteindre la sérénité.

Ce texte retiendra l’attention de tous ceux qui s’intéressent à la théorie d’Epicure, ils trouveront à la fin de cet opus La Lettre sur le Bonheur et pourront ainsi la comparer avec les objections que l’auteur de la réponse lui oppose. Par-delà la quête de la sérénité, le bonheur tel que le conçoit Epicure n’est peut-être pas celui que l’ensemble des humains recherche, il manque un peu de sel et de piquant. La volupté est peut-être porteuse d’inquiétude mais elle est aussi génératrice de certains plaisirs dont d’aucuns sauraient se satisfaire. Chacun appréciera les objections présentées par l’auteur à la mesure de sa conception de la vie sur terre.