Sentences de Solitude
de Thierry Roquet

critiqué par Débézed, le 11 novembre 2019
(Besançon - 76 ans)


La note:  étoiles
Je suis seul ce soir...
Il semblerait que Thierry Roquet ait écopé d’une lourde peine de solitude et c’est avec une sincère résilience qu’il accomplit cette punition en rédigeant des aphorismes à son honneur : condamner à écrire des aphorismes exprimant la solitude dans laquelle il semble se débattre, comme auteur s’entend, pour le reste, on ne saura jamais. Espérons seulement qu’il aura accompli sa punition avant qu’un nouveau siècle s’épuise. Je n’ai pas recensé tous les aphorismes de ce recueil évoquant la solitude à laquelle l’auteur semble condamné, j’en citerai seulement deux ou trois dont je me souviens. Le premier est bien installé à la première page et il expose clairement l’intention de l’auteur : « Je vais tromper ma solitude avec l’ennui ; puis les présenterai l’un à l’autre ». Les autres sont plus loin dans le texte. Le suivant lui permettra de réaliser son premier en jouant les Parapluies de Cherbourg, « Je vais tremper ma solitude en sortant sous la pluie ». Le dernier que j’ai retenu est plus philosophique, plus profond, il invite à la réflexion et même à la méditation : « La solitude est à double tranchant ; on ne sait jamais trop si cette confrontation permanente à soi abouti à la justesse ou au déni, au repos ou à l’épuisement total ».

Thierry ne s’est pas contenté de tromper sa solitude, il a largement balayé le champ de ses activités, préoccupations, réflexions personnelles mais aussi toutes le stupidités, incongruités et autre sottises dont notre société accouche régulièrement. Il les a croqués non pas comme un vulgaire toutou mais plutôt comme un habile caricaturiste avec les mots dont il connait le sens le moins apparent et dont il maitrise l’usage avec une grande adresse. Un Roquet installé chez Cactus inébranlable ça peut piquer mais ça peut mordre aussi avec en guise de crocs des mots, de mots détournés, des mots affutés, des mots acérés mais également de mots doux, des mots gentils, et surtout des mots drôles et des fulgurances hilarantes.

« Je garde mes idées pour moi : je me retire donc de l’avis politique ».
« L’éternité n’est pas si longue, il suffira de s’y habituer ».
« Je garde la même chemise pour n’avoir pas à changer trop souvent d’avis ».

Pour que l’auteur se sente moins seul on peut l’assurer qu’il a des lecteurs qui le lisent avec plaisir et un illustrateur, Ben Parva, qui lui a fait une jolie couverture.