La Minotaure
de Mariève Maréchale

critiqué par Libris québécis, le 16 juillet 2019
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
Exister tel que l'on est
Le minotaure est un monstre mi-homme mi-taureau de la mythologie grecque. Mariève Maréchale, qui en est à son premier roman, explore ce mythe pour l’appliquer à la situation des femmes. Son héroïne sent cette dualité qui l’habite. Elle a découvert qu’une part de virilité constitue un facteur de son identité. Elle choisit Maude, une amie décédée, comme confidente de son cheminement tourmenté afin d’assumer sa double personnalité.

Sa quête vise toute la gent féminine. On est homme et femme quoi qu’on en dise. Dans une société sexiste, véhiculer cette vérité est troublant pour les hommes ne souhaitant comme compagnes que des êtres encarcanées qui ne s’incarnant que dans des cadres rigides. La situation a changé au cours du temps, mais le machisme n’est pas mort pour autant. L’hétérosexuel blanc défend sa suprématie à voix basse en Occident, mais il veille au grain. C’est le sens de la révolte que véhicule ce roman féministe.

Il s’agit d’une révolte excessive qui confère un sexe aux règles de grammaire. Le féminin et le masculin en français ne précisent que l’origine latine. Un homme peut donc être une victime ou une recrue. L’auteure se moque de ces normes. Donc pas de il ou de elle, mais un ille qui englobe tous les humains. Le procédé dénote toute la douleur ressentie pour s’émanciper selon ce que l’on perçoit de soi. Et les miroirs patentés reflètent l’image d’un concept de femme fabriquée en laboratoire.

Quand on refuse de se laisser modeler, il s’en suit une réaction apparentée à la folie. La protagoniste éprouve de la culpabilité dans sa décision de rejeter le moule proposé. Et ce rejet entraîne l’opposition méprisante des chevaliers du chromosome Y. Elle leur retourne la balle comme un bon joueur de baseball. Mais quelle sera son arme pour vaincre l’adversaire ? Il faut attendre patiemment le dénouement.

L’auteure soumet la thématique au scanner. Les résultats montrent par fragments la rébellion d’une âme affolée en train d’ajuster son existence à ce qu’elle est. Ce roman d’une grande sensibilité creuse une identité avec un marteau-piqueur. On ne construit pas une maison sans excaver. C’est, somme toute, intéressant pour les lecteurs sensibilisés aux mystères de l’âme que Mariève Maréchale tentent inutilement d’illustrer par des scènes empruntées au cinéma.