La Troisième voie qu'ont initiée Benito Mussolini et ses fidèles lieutenants entre 1919 et 1945 était novatrice, porteuse d'espoir d'une grande majorité d'Italiens pour s'achever dans une tragédie et une sorte de pantalonnade née des circonstances que l'Italie, laboratoire du fascisme, a traversées.
Serge Berstein et Pierre Milza dans cet essai qui est ancien désormais (1970), examinent de façon exhaustive ce phénomène politique original des débuts (1921-1927) à la prise de pouvoir (1927-1940) jusqu'à la chute du régime (1940-1943). Né d'une crise multidimensionnelle, le fascisme s'est nourri des problèmes structurels de la péninsule tels que la répartition des terres ou des fractures territoriales mais également des circonstances nées de la fin de la Première Guerre Mondiale. Les revendications de l'Italie, vainqueur du conflit avec l'Angleterre et la France, ne sont pas accordées, les traités de paix ne lui sont pas favorables, donnant naissance à un sentiment d'injustice et à des courants révisionnistes au sein du corps politique italien. Gabriele d'Annunzio est à ce titre un exemple significatif par la création de la République de Fiume, entreprise au cours de laquelle il s'empare avec ses partisans de cette ville sur la côte de l'Adriatique.
Mussolini se dresse à la fois contre le capitalisme et le communisme mais doit bientôt composer avec le grand capital pour surmonter les difficultés économiques. Il obtient quelques succès notables dans les domaines diplomatiques (arbitre des tensions en Europe, rapprochement avec le Vatican- Accords du Latran) ou agricoles et il parvient à maintenir une économie viable malgré des décisions peu pertinentes (une politique monétaire irréaliste par exemple).
Mussolini, emporté par son orgueil, décide de se lancer dans l'aventure coloniale à contre-courant et envahit l'Ethiopie (1934) se plaçant au ban de la Société des Nations qui lui impose de dures sanctions économiques. Bientôt, en vue d'exporter" son modèle, il soutien les régimes profascistes comme celui en Angleterre d'Oswald Mosley ou la Phalange espagnole de José Antonio Primo de Rivera. L'Espagne, pays dans lequel il jette ses Chemises Noires pour appuyer la révolution nationale de Franco.
De plus en plus lié à l'Allemagne nazie, le régime fasciste est bientôt entraîné dans la guerre et dès lors, ne pouvant répondre aux efforts imposés par les combats, travaillé par l'antifascisme qui croit depuis la fin des années 30, va subitement s'effondrer en 1943. Mussolini, pressé par Hitler, tentera de se rétablir dans le nord du pays avec sa République Sociale Italienne en revenant à l'esprit originel du mouvement mais sa fin, pendu par les pieds sur une place de Milan, montre que son temps était vraiment révolu.
Berstein et Milza donnent un livre exhaustif, partial et académique dans sa construction. En effet, ils déroulent les thèmes (économie, diplomatie, culture,...) de façon linéaire sans chercher à les mettre en regard l'un de l'autre, l'approche exhaustive de la démarche est cependant à souligner et le lecteur tire un grand bénéfice de sa lecture. Les auteurs m'ont semblé partiaux car j'ai cru déceler quelques jugements de valeur, le chapitre sur l'antifascisme est à ce titre assez évocateur.
Vince92 - Zürich - 47 ans - 1 juillet 2025 |