Le train de 5h50
de Gabrielle Ciam

critiqué par Clarabel, le 10 juin 2004
( - 48 ans)


La note:  étoiles
Subtil et osé
"Le train de 5h50" fait partie de ces petits livres de quelques pages qu'on lit en peu d'heures et qui vous submerge d'émotions farfouillées. Le titre ressemble à une intrigue d'Agatha Christie et fait vaguement "roman de gare" (haro sur le jeu de mots...) mais on s'y trompe complètement ! En fait l'auteur va user d'un rare talent à peindre un désir fugace, une envie violente et une lascivité étonnante sans entrer dans des scènes torrides d'acrobaties sexuelles. Il suffit d'une femme et d'un homme, tous deux prennent le train du petit matin, celui de l'aurore où les paysages et les gens sont encore endormis. Et puis, "elle le regarde, il la regarde le regarder. C'est comme ça que les choses commencent entre eux."
Des échanges de regards, des effleurements, des attouchements avec les mains, les jambes, les pieds... Jamais un baiser échangé, ni même une parole. Leur relation est sensuelle et intense, elle dégage un érotisme surprenant où l'auteur a misé sur l'atmosphère et la sensation au lieu du déballage décadent. Et le résultat est épatant : c'est judicieusement poétique et torride, suggestif et langoureux. Gabrielle Ciam réussit un pari audacieux : oser décrire l'indicible, l'attirance des corps et la volupté en des termes propres et mesurés. L'ensemble est osé, impudique mais juste.
De plus, elle ose le vécu alterné en se mettant dans la peau de la femme puis de l'homme. Où l'on découvre le portrait d'une femme moderne, libertine, réservée mais pas timide, et qui ose sans brusquer. "Elle ne se fixait pas, quittait souvent, était quittée. Elle était en fait une femme très libérée et très seule, mais elle gardait un peu de ses amants dans ces habitudes vestimentaires qui la définissaient de plus en plus, l'affinaient même, faisant d'elle une femme désirable et désirée." Lui est un homme marié depuis vingt ans, il est heureux, toujours amoureux de son épouse mais cette rencontre va le bouleverser et chambouler son univers. Ils sont l'un et l'autre l'inconnue ou l'homme du train. Ils se plaisent et cette ébauche de relation amoureuse égale tous les rapports jamais imaginés entre un homme et une femme.
Gabrielle Ciam signe un roman tendre, au langage parfois cru et audacieux. Une très belle mélopée se dégage de ce "Train de 5 h 50" ...
sensuel 8 étoiles

Un homme et une femme se rencontrent dans le train de 5 h50.

Voiture 13. Place 41. Première rencontre suivi d’une deuxième,

puis troisième dans un rituel savamment orchestré. Hasard qui

les a fait une première fois s’assoir l’un en face de l’autre.

Echanges de regard. Qui très vite engagent le corps tout entier.

Elle qui remonte le pied le long de sa jambe, lui qui caresse du

bout du talon le haut de ses cuisses. Elle tendre et appliqué, lui

vif et fougueux. Le baiser langoureux est gardé pour la fin.

Comme si le sexe à mesure qu’il devient moins cru laisse la place

aux sentiments moins violents qui adoucissent un peu le désir

brut des corps. C’est l’histoire d’une passion violente qui se

nourrit de la présence même de l’absence de mots.

Ce court récit est agréable à lire. Il est très bien écrit. Le style

est fluide et raffiné au plus près de la complexité des sentiments

éprouvés. Et ceci n’en n’est pas moins un paradoxe de l’auteur.

Car elle utilise avec emphase un langage délicat pour exprimer

une passion brute et naïve en même temps qu’elle n’hésite pas à

utiliser des mots vulgaires comme par exemple le mot queue.

Enfin voilà c’est dit. Et là c’est un véritable tour de force de sa

part. Ce qui fait un style très original. Et surtout elle parvint à

nous faire ressentir, nous lecteurs, la violence d’un désir que

peuvent éprouver deux inconnus qui se rencontrent par hasard.

Ceci parfaitement traduit par l’absence de dialogue. La

narratrice se concentrant dans une première partie sur le point

de vue d’elle et dans une deuxième partie sur le point de vue de

lui. Comme si le rapport charnel advenait là ou la parole

manquait. A La fin du récit deux ou trois mots seront échangés

qui marqueront l’entrée dans la sphère de l’intimité. Et c’est bien

là que l’auteur après tout veut en venir. Le désir pur n’a pas

besoin toujours de l’intimité exploré et construit au fil des jours

pour exister. C’est même tout le contraire. La violence de la

passion se joue de la raison et pour la vivre, la simple

connivence des corps et des esprits à l’instant t suffit.

Hibou - - 49 ans - 12 décembre 2010


Un bon moment d'émotion 6 étoiles

C'est la première fois que je lis ce genre de livre, érotique, on peu le dire, même un peu plus, mais heureusement sans jamais tomber dans le vulgaire, malgré quelques détails chavirants et surprenants (la chaussette!).
C'est l'histoire d'une passion folle pour l'un, déraisonnable pour l'autre, mais qu'importe, d'une envie de l'autre qu'on ne connaît pas, comme ça par pur plaisir physique, mais comme les circonstances pratiques ne s'y prêtent pas, ils vont se contenter de "jouer", par pur plaisir érotique.
Le livre est très court, écrit gros, se lit en 1 h ou 2, mais c'est suffisant pour nous mettre en émotion, vivre avec eux le manque, l'absence, le désir de l'autre, cet inconnu qui est déjà quelqu'un pour nous, l'attente de le revoir, et l'instant où je cite Leny Escudero :
"Puis tout s'est arrêté, tout à cessé de vivre
Suspendu au moment, où je t'ai reconnu
Mon Dieu, qu'il était triste, ce triste quai de gare..".
C'est émouvant, crispant, envoûtant.. et on reste sur sa faim. Cela dit, c'est mieux ainsi.

Tameine - Lyon - 58 ans - 10 septembre 2008


sensualité... 10 étoiles

Instant de sensualité, d'érotisme...
Trop court, on aimerait pouvoir lire quelques pages de plus... toujours plus... Lu en 1h, mais il se dégage de ce livre une intensité rare.
Cette sensation de manque de l'autre au fil des rencontres malgré le peu de mots échangés, seulement des gestes fous, des regards appuyés.
A lire absolument...

Angelnix - - 53 ans - 7 juillet 2006