La Vraie Vie
de Adeline Dieudonné

critiqué par Papyrus, le 5 septembre 2018
(Montperreux - 64 ans)


La note:  étoiles
Une pépite belge...
Féroce, cruel, captivant, ironique, violent, tendre... voici quelques qualifiants qui me viennent à l'esprit pour évoquer ce premier roman de Adeline Dieudonné. On est happé dès les première lignes dans l'univers de cette fillette de 10 ans qui nous donne à voir avec lucidité les personnages qui gravitent autour d'elle: son père inquiétant, sa mère qu'elle qualifie d'amibe sans consistance, son petit frère qu'elle chérit et protège, puis la voisine, le glacier, le ferrailleur, ... peu à peu on entre dans le quotidien étouffant et angoissant de le jeune narratrice qui nous en livre une analyse sans concession.
Angoisse, mensonge, espoir, rêve de pouvoir remonter le temps afin d'effacer le cauchemar qui vient de bouleverser le quotidien des deux enfants, puis la peur, la peur qui peu à peu s'insinue en nous dans ce huis clos de plus en plus étouffant, les sentiments les plus extrêmes nous assaillent et nous portent sans que l'on puisse lâcher le roman vers l'issue de ce thriller familial . Adeline Dieudonné nous livre un texte abouti, au style enlevé, puissant, incisif qui nous bouleverse jusqu'à la dernière ligne.
Un seul bémol à noter pour moi, infime, le choix du titre qui n'est guère original (de nombreux autres romans le possèdent déjà) et pas très à la hauteur de ce beau texte.
Pour moi, ce roman est une pépite de la rentrée littéraire 2018 à découvrir sans tarder.
Adolescents, ogre et violence quotidienne 7 étoiles

La narratrice est une adolescente dont le quotidien est anxiogène. Son père est un chasseur et un homme violent. Gilles, son petit frère est un garçon solaire, jusqu'à ce qu'il assiste à un accident. Leur mère est totalement effacée et écrasée par la violence paternelle. La mort semble roder dans cette demeure.

Ce roman dont on a beaucoup parlé et qui a remporté de nombreux prix est addictif. Un vrai page-turner. Adeline Dieudonné a construit son roman en nombreux courts chapitres au rythme enlevé. L'écrivain a une imagination débordante et affronte la violence dans son roman, même celle que l'on n'aime pas voir. Le roman contient des rebondissements et des scènes extrêmement fortes, quasiment cinématographiques. Il y a sans doute du Stephen King dans ce roman, auteur qu'elle cite elle-même. Le lecteur souffre avec le personnage et certains passages sont inconfortables, comme ceux qui concernent les animaux ou tout simplement tous ceux qui expriment le sadisme de certains personnages. Je reste évasif pour ne rien divulguer sur le roman.

A l'influence de Stephen King s'ajoute celle du conte qui alimente ce roman avec un ton plus grave et plus impressionnant : il y a une héroïne très jeune, un ogre de façon métaphorique, la forêt comme lieu initiatique, le loup et ses connotations sexuelles ... La construction du roman est vraiment intéressante et l'atmosphère des années 80 est bien rendue par quelques petits détails bien sentis qui surfent quelque peu sur cette décennie très en vogue dans les séries télé ou même dans la musique.

De plus, Adeline Dieudonné dépeint l'adolescence de son héroïne avec justesse, le développement de celle-ci dans une atmosphère étouffante. Il y a cette part d'humanité qui apparaît là où la monstruosité prédomine. Le roman est écrit à la première personne du singulier, ce qui fait que tout est vu, ressenti, pensé par l'adolescente, avec ses moments de lucidité et ses interrogations aussi. Ce point alimente aussi le côté anxiogène car le lecteur prend conscience de la peur qui règne dans cette demeure face à un homme incontrôlable. Les personnages secondaires sont intéressants aussi, voire attachants.

Ce roman se lit avec plaisir. Il intrigue et indispose tout en ayant des scènes très marquantes et cauchemardesques pour le lecteur. Le sujet est grave et vu par un personnage jeune. Ce roman a le mérite d'attirer notre regard sur la monstruosité de certaines situations bien réelles. Malheureusement, le texte n'est pas surnaturel et le monstre est bien humain.
En revanche, j'avoue ne pas avoir été séduit par l'écriture, pourtant métaphorique parfois et très efficace quant au rythme. Le roman reste efficace, inspiré et percutant.

Pucksimberg - Toulon - 44 ans - 21 mai 2023


Puissant !!! 10 étoiles

Roman tout en puissance...
A dévorer absolument.
Ce livre est une incroyable découverte.
Un père détestable d'une violence xxl, une mère effacée et qui souffre, un petit frère qui s'est réfugié dans un autre monde et enfin l'héroïne qui tente de survivre dans tout ça.
Histoire originale qui va vous surprendre.
Le style de Adeline Dieudonné vaut vraiment le détour !

Jordanévie - - 48 ans - 25 avril 2023


Excellent roman, parfois glauque, jamais misérabiliste 9 étoiles

La narratrice, une fillette de dix ans – au début du roman, ado ensuite - vit dans une maison moche d’un quartier moche. Son père est un passionné de chasse au gros gibier et un macho violent, le tyran domestique dans toute sa splendeur. La mère, brutalisée au gré des caprices de Monsieur, est quasi inexistante, « aussi transparente qu’une amibe ». La fillette ne s’évade de l’atmosphère familiale pesante que grâce à sa complicité avec son petit frère, Gilles, un enfant rieur, et à leurs jeux dans le cimetière de voitures. Il y a aussi les virées chez Monica, une vieille voisine qui invente des histoires merveilleuses. Un jour les deux enfants assistent à un terrible accident. Si la fillette parvient à s’en remettre, Gilles en sort traumatisé. Il ne rit plus et se montre quasiment muet. Il semble avoir perdu toute joie de vivre. La fillette ne se résigne pas, elle imagine une machine à remonter le temps qui lui permettra de retourner juste avant l’accident et d’annihiler celui-ci. Bien sûr elle ne réussira pas – on n’est pas dans un roman fantastique ou de SF – et avec un tel père, elle va rencontrer bien d’autres difficultés.

Avec un contexte aussi déprimant et inquiétant on pourrait craindre un roman lourdement réaliste, misérabiliste et mélodramatique. « La vraie vie » échappe totalement à ces défauts grâce à la force de caractère de la fillette, son intelligence, son imagination, sa volonté de ne pas être une victime comme sa mère et de sortir son frère de son marasme.

C’est donc un roman certes riche en péripéties dramatiques, parfois même très glauques, mais dans lequel l’espoir n’est jamais perdu. Par moments on décolle du réalisme pour déboucher sur une atmosphère quasi fantastique due à l’imagination de la fillette (l’illustration surréaliste de couverture traduit bien cet aspect.)

Le style : mots simples, phrases courtes, utilisation du passé composé.

Un roman haletant et plein d’émotion que j’ai lu d’une traite et que je recommande chaudement.

Malic - - 82 ans - 9 mai 2022


Haletant 9 étoiles

Que voici un petit/court roman belge excellent ! Pour un premier roman, c’est en effet une grande réussite, je suis d’accord. Comme beaucoup d’entre les lecteurs, je n’ai pas pu le quitter avant la fin et je pense même que j’étais « scotché » devant la force des idées et des faits, peut-être la bouchée bée, je ne me rappelle plus, peut-être frissonnant, cela se peut. En tout cas, ébloui par le savoir-faire de l’auteure et le "savoir-vivre" de ces personnages.

Ardeo - Flémalle - 76 ans - 4 mars 2021


Epatant 8 étoiles

Une toute jeune adolescente vit dans une cité en compagnie de sa mère, son père, son frère Gilles et le chien Dovka. Le père est une brute épaisse qui passe son temps à tabasser son épouse et à terroriser ses enfants. L’ado tente de survivre dans cette ambiance. Heureusement, elle a son petit frère (en tout cas au début du roman), sa voisine Plume et le son ami, également le prof où elle va suivre des cours de mécanique quantique. Nous suivons son parcours jusqu’à un incident majeur.
Un roman épatant qui a reçu, entre autre le prix Rossel 2019 (le Goncourt belge). Il tient superbement la route grâce à un scénario en béton et le langage employé à savoir celui d’une ado de 10 ans. A propos, quel est son prénom ?

Extrait :

- J’aimais mon corps ? Ça n’a rien de narcissique. Même s’il avait été moche, je l’aurais aimé pareil. J’aimais mon corps comme un compagnon de route qui ne me trahissait jamais. Et que je devais protéger. J’aimais découvrir ses nouvelles sensations. Et les plaisirs possibles. Je faisais en sorte de me rappeler les moments agréables et d’oublier la douleur.

Catinus - Liège - 72 ans - 15 août 2019


Roman intense mêlant peur, violence et espoir 8 étoiles

Une petite fille de dix ans est un jour le témoin d’un drame. Son petit frère Gilles est tellement sous le choc qu’il s’assombrit de jour en jour. Leur père bat leur mère. Le seul espoir auquel se raccroche la fillette, c’est de devenir comme Marie Curie et d’apprendre comment remonter le temps pour effacer le passé.
Ce roman est très dur à lire, tout en tension, grossissant progressivement. Je ne crois pas à la libération du mal par le mal, mais cette histoire reflète effectivement et malheureusement la « vraie vie ». Toutefois, l’auteure fait parler une jeune adolescente et lui attribue une analyse psychologique qui n’est pourtant pas de son âge. Seul l’espoir fait tenir (elle et le lecteur)…

Pascale Ew. - - 56 ans - 3 mars 2019


Excellent premier roman très prometteur 9 étoiles

Un premier excellent roman de l’auteur belge qui a aussi bénéficié d’une phénoménale campagne de publicité (du moins en Belgique) en vue de promouvoir son bouquin.

J’ose comparer ce roman à « Ariane » de Myriam Leroy, également auteur d’un premier roman sorti un peu plus tôt dans l’année 2018 qui évoque aussi une jeune fille vivant un drame.

Il s’agit pour Adeline Dieudonné d’un roman clairement moins personnel, presqu’aussi fort et qui mélange les genres, soit violence, humour et une forme de caricature.

Le thème abordé est aussi moins original, soit la survie dans un milieu familial hostile et l’évasion par la création d’un monde parallèle et le refuge auprès de parents de substitution. C’est donc surtout le ton et la puissance de l’écriture qui sont inédits pour décrire un petit frère autiste, une mère transparente et un père hyper-violent.

Par ailleurs, si on peut avoir des craintes pour Myriam Leroy sur la suite à apporter à son roman, il n’y a pas à s’inquiéter pour l’avenir littéraire d’Adeline Dieudonné, voire pourquoi pas une suite à cette « vraie vie ». Dommage qu’elle ne donne pas un nom à son héroïne et narratrice.

Pacmann - Tamise - 59 ans - 14 janvier 2019


La vraie découverte ... 10 étoiles

... de cette fin d'année 2018. Une véritable claque. Et pourtant rien ne me prédestinait à lire ce roman. En effet, l'histoire n'est guère attrayante et le milieu dans lequel évolue la jeune narratrice est assez suffoquant, absurde par certains moments, cruel , cru, voire morbide comme cette fameuse pièce où règnent, tels des trophées, des animaux morts et empaillés. Pourtant, et malgré ceci, l'auteure nous empoigne discrètement mais sûrement avec ses mots et son style. Des phrases sincères, cruelles, affectueuses, crues, froides, chaleureuses ... Bref, impossible pour nous de lâcher des mains ce court roman qui sonne vrai, du début jusqu'à la fin. Une histoire qui pourrait se retrouvait dans les colonnes d'un journal rubrique faits divers. Ou qui pourrait se métamorphoser en un scénario pour le grand écran.

Nomade - - 12 ans - 9 janvier 2019


Mélange de genres 8 étoiles

Ce roman dont les médias ont beaucoup parlé est une vraie réussite : l'auteur a une belle plume et beaucoup d'imagination. Son héroïne, la narratrice, est une jeune fille qui fuit un milieu familial difficile en se créant son monde intérieur plein de fantaisie, un peu à la limite du fantastique par moment. Ca fonctionne très bien, la narratrice est très sympathique et le récit est plein de surprises et de trouvailles, on a du mal à lâcher le livre.

Saule - Bruxelles - 58 ans - 27 décembre 2018


Tendre et cruel 7 étoiles

Un premier roman, et c'est une vraie réussite. On se laisse entraîner par le récit de cette enfant. C'est touchant, tendre et dur à la fois. Tour à tour naïf et réaliste. Le père est violent, la mère et soumise et transparente (une amibe !). Il y a le petit frère, qu'il faut choyer. Et puis un voisin, adulte qui... mais n'en disons pas trop.
La critique de Papyrus étant excellente, je m'y associe sans ajout inutile. Et comme elle j'ai trouvé le titre du livre plutôt mal choisi.

Bernard2 - DAX - 74 ans - 30 septembre 2018