Le Mythe de la virilité
de Olivia Gazalé

critiqué par Colen8, le 7 mai 2018
( - 82 ans)


La note:  étoiles
Un continuum de combinaisons dépassant largement la génétique
La prééminence du féminin sur le masculin ou l’inverse, sujets maintes fois traités par la médecine, la biologie, l’histoire, la philosophie, la sociologie sont analysés dans cet essai puissant dense instructif et parfois drôle, bourré de références et de citations. Sous couvert de valorisation de la virilité désignée ici par le néologisme viriarcat, la domination masculine s’est imposée depuis la sédentarisation du genre humain. Il y aurait eu dès cette époque lointaine et sur des milliers d’années un basculement des cosmogonies et des mythes d’adoration de la Déesse vers un panthéon dominé par des dieux violents et jaloux qui aurait ensuite inspiré les monothéismes du Moyen Orient. Les hommes qui vivaient dans la souffrance et l’angoisse des pannes de l’organe pénien si incontrôlable et imprévisible, qui craignaient de ne pas être à la hauteur de leurs représentations de la virilité l’auraient compensée dans leurs façons d’être sur le reste. C’est ainsi qu’ils ont fait subir et continuent d’infliger des sévices effroyables au regard des droits universels non seulement aux femmes mais aussi à toutes les apparences de féminité et/ou de faiblesse : les leurs propres, celles des vaincus des champs de bataille, des handicapés, des enfants, des homosexuels, des esclaves, plus tard des juifs et des gens de couleur...
Génétiquement parlant les premières cellules du vivant se sont multipliées entre elles durant des milliards d’années avant l’apparition de la reproduction sexuée créatrice de la biodiversité. Toujours est-il que le fœtus durant ses premières semaines est androgyne, riche de la faculté d’évoluer en fille, en garçon ou en un entre-deux infiniment complexe. La génétique, une source parmi les cinq reconnues à ce jour d’identification de genre, se conjugue donc avec l’anatomie, le système hormonal, la construction sociale et la psychologie pour donner lieu à un continuum de variations qui brise définitivement la loi binaire d’un monde partagé entre deux sexes soi-disant complémentaires. En privilégiant l’explication sur le parti-pris, Olivia Gazalé suggère qu’une meilleure connaissance du contexte qui a forgé le mythe de la virilité avec l’ensemble de ses effets pervers puisse rétablir l’équilibre nécessaire à l’harmonie des relations interpersonnelles et mettre fin à la violence qui a accompagné ce que l’on a coutume de considérer à tort sans doute comme la civilisation et le progrès.
Un livre que tout le monde, hommes et femmes, devrait lire! 9 étoiles

Avant toute chose je précise que je ne suis pas un féministe militant acharné.

Ironie du sort, j'ai commencé la lecture de ce livre le 8 mars, la date de la journée de la femme.

On apprend beaucoup de choses dans ce livre, quant à l'adoration de la femme, et du féminin plus largement, pendant des millénaires, mais aussi quant à l'origine de l'oppression des femmes par les hommes, puis comment l'homme a justifié cette oppression, qui en a amené d'autres, par exemple celle de l'homme blanc sur l'homme de couleur.

Olivia Gazalé montre que la crise de virilité à laquelle on assiste aujourd'hui - que regrettent tous les mâles machos qui détestent les femmes - n'est pas la fin des hommes, mais la fin d'un système, le viriarcat, qui a non seulement opprimé les femmes pendant des siècles, mais aussi emprisonné les hommes en les enfermant dans le piège qu'est la virilité.
J'ai d'ailleurs particulièrement apprécier cette phrase "Le devoir de virilité est un fardeau, et "devenir un homme" un processus extrêmement coûteux".
Ce livre est une véritable libération pour les hommes.

Ce que j'ai aussi apprécié dans ce livre c'est qu'il montre aussi les limites du féminisme, et plus particulièrement de la morale antisexiste qui censure les désirs des hommes.
Dans un passage que j'ai adoré, Olivia Gazalé écrit cette phrase qui résume bien les effets pervers du féminisme radical : "Oui, la femme veut être respectée dans sa dignité, mais non, elle ne veut pas d'un homme qui freinerait ou réprimerait ses désirs pour ne pas la heurter". Aussi présente-t-elle le postféminisme qui est le féminisme de nouvelle génération, qui ne cherche plus l'égalité entre les hommes et les femmes, mais cherche à abolir les deux catégories.

Je recommande vivement la lecture de ce livre pour toutes ces raisons, je me suis senti libéré en terminant le livre, libéré des normes ridicules qu'imposent la virilité (qui n'existe pas d'ailleurs, d'où le titre ''Le mythe de la virilité").

Haas Nigen - France - 32 ans - 11 août 2018