Et il foula la terre avec légèreté
de Mathilde Ramadier (Scénario), Laurent Bonneau (Dessin)

critiqué par Fanou03, le 25 avril 2018
(* - 48 ans)


La note:  étoiles
Un géologue aux Lofoten
Je viens de découvrir là avec ravissement un auteur dont le dessin m'a absolument enchanté. C’est Laurent Bonneau, en compagnie de Mathilde Ramadier au scénario, qui a commis ce splendide album, extrêmement séduisant sur le plan graphique, qui nous conte la déambulation presque solitaire d’un jeune homme mis face à l’immensité du Monde.

Ce jeune homme c’est Ethan, géologue de profession, qui est envoyé par son employeur, une puissante compagnie pétrolière, en Norvège, sur l’archipel des Lofoten, tout près du cercle polaire, pour estimer la possibilité d’exploiter de nouveaux gisements d’or noir offshore et analyser leur potentiel économique. Au cours de ses déambulations sur l'archipel, ses échanges avec les locaux vont nourrir ses réflexions et modifier le sens de son voyage.

Le dessin de Laurent Bonneau rend sublimement tout d’abord l'âpreté et la beauté des paysages de cette région de la Norvège, faites de côtes escarpées et désertes, où s’égrainent des villages de pêcheurs qui se vident peu à peu de leurs habitants. Il maîtrise également à la perfection la dynamique des visages, des attitudes et des corps, ce qui lui permet, pour les nombreuses scènes dialoguées qui compose une grosse partie de l’album, de rendre ces passages dynamiques, en jouant éventuellement de belle façon sur le découpage des cadres. L’intériorité d’Ethan, le protagoniste principal, et sa quête, est aussi mise en valeur par les silences des pages, les fondus, le travail sur ses regards et ses expressions.

Le propos, quant à lui, relève d’un certain engagement écologique (certes parfois bien assez didactique à mon goût) à travers le cas norvégien, enrichi par l'exploitation du pétrole de son sous-sol marin. Il poste la question du choix du modèle de développement que nous voulons réellement et met l’accent sur nos propres contradictions. La posture d’Ethan, qui se découvre dans le silence du ciel étoilé des Lofoten, évoque un Albert Monod méditant dans le désert, et donne à l’album une profondeur presque spirituelle.