La guerre des métaux rares : La face cachée de la transition énergétique et numérique
de Guillaume Pitron

critiqué par Colen8, le 30 mars 2018
( - 82 ans)


La note:  étoiles
Remède pire que le mal
Pauvres de nous qui tentons de réduire les dépendances et pollutions dues aux énergies fossiles par des solutions encore plus dévastatrices tant pour l’environnement que pour les réserves en eau. Green tech et révolution numérique sont moins riches de promesses que de désillusions d’autant que le recyclage après usage de ce qui a été extrait de la terre reste très insuffisant. La bêtise des stratèges géopolitiques occidentaux n’a d’égale que leur arrogance et leur appât du gain à court terme. Adeptes du néolibéralisme dans les années quatre-vingt avec la délocalisation massive des secteurs miniers et industriels ils n’ont pas davantage hésité devant la suppression de millions d’emplois qu’ils n’ont senti le piège qui en moins de deux générations pourrait bien asphyxier les économies réputées les plus puissantes du monde. Pendant ce temps le régime communiste chinois vivant sur le temps long a d’abord proposé une main d’œuvre à des coûts dérisoires, a progressivement copié les technologies de ses donneurs d’ordre jusqu’à les dépasser dans à peu près tous les secteurs.
Les propriétés chimiques catalytiques et enzymatiques des métaux et terres rares en ont fait des matériaux de premier choix pour les industries du numérique sans lesquelles on ne saurait fabriquer ni faire fonctionner les éoliennes, panneaux solaires, électro-aimants de moteurs électriques, encore moins les téléphones portables, le cloud ni les industries de la défense(1). Il se trouve que la Chine est en situation de monopole sur la production de certains de ces éléments occupant en même temps le premier rang des réserves. Judicieusement elle a mis en œuvre une « diplomatie des terres rares » qui lui permet de jouer sur les cours, à la hausse pour mettre en difficulté ses concurrents, ou à la baisse pour décourager toute prospection minière qu’elle jugerait non conforme à ses intérêts. Il faut lire cette enquête minutieusement documentée pendant 10 ans d’un journaliste qui a parcouru la planète en tous sens, rencontré maints experts, lu autant de rapports pour en comprendre les enjeux.
(1) Des annexes donnent la liste des applications industrielles des métaux et des terres rares, des zones de production, de la dépendance de l’UE à cet égard.
Transition, piège à c... 9 étoiles

Les énergies renouvelables ne sont finalement pas si vertes que cela et la transition énergétique risque fort d’être la transition d’une dépendance à une autre, du pétrole saoudien aux métaux rares chinois. Telles sont les idées fortes qui se dégagent de cette enquête.

Pas si vertes les énergies renouvelables ? Elles font appel à des technologies de pointe, batteries rikiki ou super-aimants qui ne sont concevables que parce que nous maitrisons les propriétés fantastiques des métaux rares, ces trucs nommés Gallium, Indium ou Antimoine, pour quelques grammes desquels il faut creuser et nettoyer à l’acide l’équivalent d’une piscine olympique. Ce que fait la Chine, sans trop d’états d’âme.

Mais elle ne fait pas que cela ; patients, les dirigeants chinois ont su jouer de leur quasi monopole pour, jouant sur les cours, éliminer la concurrence, progresser dans la chaîne de valeur en proposant des produits finis et s’imposer finalement comme l’interlocuteur principal sinon unique pour toutes ces technologies.

Il faut lire ce livre. Après on ne regarde plus son smartphone de la même façon et on se dit que la transition énergétique sans effort, c’est comme les régimes miracles où « on peut continuer à manger comme avant », ça n’existe pas !

Guigomas - Valenciennes - 54 ans - 15 mai 2018