Le Rêve de Dieu
de Krsté Tchatchanski

critiqué par Débézed, le 2 janvier 2018
(Besançon - 77 ans)


La note:  étoiles
Destins croisés
Pendant les années titistes et peut-être même un peu après, dans un petit village de la région du lac d’Orihd, au sud de la Macédoine, Nicolas, dit Nicolas le Tsar, qui a vaillamment combattu les Allemands pendant la guerre, disparait précipitamment pour éviter d’être emmené par la police révolutionnaire. Le pouvoir lui reproche son opposition au collectivisme et à la révolution. Son fils Vergo assiste, avec sa mère, tous deux impuissants, à la perquisition de la police.

Bien des années plus tard, Vergo revient au village avec le cœur plein de rancune à l’endroit de son père toujours absent dont certains disent en ricanant qu’il a été émasculé dans les geôles du pouvoir, et rempli de haine à l’encontre l’assassin de sa sœur alors qu’elle était une toute jeune fille. Son épouse a plongé dans la folie, il a rompu avec sa maitresse, Emilia, pour ne pas la délaisser. Il a juré vengeance sur la dépouille de sa sœur, il rentre au village pour assouvir celle-ci. Emilia voyage avec une troupe de comédiens, elle croit de moins en moins que Vergo quittera sa femme. Leurs histoires parallèles se rejoindront peut-être au bout de ce long chemin de douleur qui symbolise les malheurs que le peuple macédonien supporte depuis des lustres.

Ce récit, achevé alors que commençait le martyr de Sarajevo, rappelle que la Macédoine a subi l’emprise douloureuse des armées allemandes les combattant vaillamment aux côtés du Maréchal Tito mais étant obligée de plier sous le joug du régime imposé par le Maréchal victorieux. Elle nous rappelle surtout que cette terre fut un royaume fort et fier désormais découpé en trois parties au grand dam de ce peuple humilié et dispersé qui ne trouve plus les moyens de sa subsistance dans son pays. Condamnés à l’exil, les hommes surtout ne reviennent en terre natale que pour y être inhumés, comme Nicolas le Tsar. « Est-elle donc maudite cette terre macédonienne que je veux réunifiée et entière ?! »

Le texte de Tchatchanski peut dérouter le lecteur, il est composé de pièces dispersées dans le livre qu’il faut réassembler pour reconstituer l’intrigue. Comme les pièces qui donnent les éléments de compréhension nécessaires au lecteur, sont placés à la fin du texte, il faut rester très vigilant tout au long de la lecture pour ne pas perdre le fil de l’histoire en suivant les chemins séparés d’Emilia et de Vergo qui se rejoindront peut-être un jour comme les trois parties de la Macédoine pourraient-être réunies elles aussi …. un jour…. un jour lorsque les balles qui sifflent déjà aux frontières du pays créeront un ordre nouveau dans les Balkans. Peut-être ?

« La Macédoine est une terre biblique et elle est le rêve de Dieu ».