Sans équipage
de Claude Raucy, Jean Morette (Dessin)

critiqué par Débézed, le 18 novembre 2017
(Besançon - 76 ans)


La note:  étoiles
Douleur d'enfance
« frère ô frère
à quoi bon ces tempêtes
ces nuages comme des taupinières
dans un ciel sans étoiles »

Que d’amour faut-il avoir dans le cœur pour s’adresser ainsi à un frère certainement disparu beaucoup trop vite

« on dit en latin
que tu vogues avec les anges »

On sent que ce frère n’était pas qu’un frère qu’il était beaucoup plus, quelque chose comme un modèle, une idole dirait certains mais plus certainement un complément, un autre soi.

« frère tu étais mon capitaine
le savais –tu »

Ce frère n’est plus, la tristesse a envahi le cœur de l’enfant, le vieil homme se souvient bien, aujourd’hui est comme hier, la plaie saigne toujours, l’absence reste toujours aussi douloureuse.

« ta voix a pris la couleur du sable
elle ne hisse plus les voiles
je vais à la dérive »

Mais le temps fait son office, le petit frère continue sa vie… seul

« frère mon ami
je poursuis sans toi l’aventure
étonné d’être seul »

L’auteur n’a plus que les mots pour faire vivre encore ce frère adulé, les mots qu’il manie avec un talent infime, des mots qui font battre le cœur, des mots qui mouillent les yeux. Des yeux qui pourraient diluer les dessins en noir et gris de Jean Morette qui alternent avec les poèmes de Claude Raucy et donnent de la chair à ces mots, de la vie à cette douleur pour qu’elle fasse exister toujours ce frère tant aimé maintenant qu’il a déserté notre monde et le paysage à jamais vide.

« je ferme les yeux pour voir les vagues
il n’y aura plus de beau temps
sans toi ce sera toujours les gouttes
l’horrible crachin »

Un recueil magnifiquement illustré beau comme seule une grande souffrance inextinguible peut-être belle.