Les concombres n'ont jamais lu Nietzsche
de Serge Basso de March, Fred Le Thouron (Dessin)

critiqué par Débézed, le 20 juin 2017
(Besançon - 76 ans)


La note:  étoiles
Les mots qui boitent
« Aphorismes bancals,
Proverbes bancroches
Et petites phrases décalées »

Le sous-titre de ce recueil insinuant que tout est plus ou moins boiteux dans ce texte, peut paraître péjoratif mais, à mon avis, il signifie plutôt qu’avec de belles phrases, de belles expressions, de beaux proverbes, l’auteur a réussi à faire des phrases qui ne veulent plus du tout dire ce que l’auteur original avait voulu faire dire à ses mots. Ce sous-titre éloquent conduit directement à l’avant-propos d’Alain Dantinne qui le complète un peu radicalement : « Qui connaît Serge Basso sait qu’il a la détente rapide, il vous zigouille une idée généreuse en trois bons mots bien frappés ! ». « C’est un déviant textuel, un faussaire sous ses faux airs de Napolitain… »

Ainsi averti le lecteur ne pourra que constater les dégâts commis par ce démolisseurs de belles phrases, ce détourneur de bons mots, ce copiste pervers, ce « caviardeurs » de sentences moralisatrices …. et apprécier la finesse de son esprit :

« Pour Yseult l’amour était attristant. »

L’étendue de sa culture :

« J’ai connu une Hélène qui aimait Paris sans que ça déclenche une guerre à Troyes. »

L’habilité de ses détournements :

« Renoncer aux pompes de Satan, ça ne veut pas dire chausser les mules du Pape. »
« Quand les cyprès sont loin, les distances sont faussées. »

La noirceur se son humour :

« La guillotine travail au coup par cou. »

Sans oublier ses piques acérées :

« Depuis que j’ai une cirrhose de la foi, j’ai arrêté le vin de messe. »
« Aux religions du livre je préfère la religion des livres. »

Mais que serait ce recueil sans la contribution du désopilant et néanmoins célèbre dessinateur Lefred Thouron qui complète magnifiquement les saillies de l’auteur qui avec toute sa modestie avoue : « Le faiseur d’aphorismes n’est, devant les hommes, qu’un pêcheur en mots troubles ». Mais, je vous l’assure la friture est bonne à déguster sans attendre l’inutile après-face de Claude Frisoni !