Les songes et les sorts
de Marguerite Yourcenar

critiqué par Alceste, le 25 mai 2017
(Liège - 62 ans)


La note:  étoiles
La part fatale du songe
Marguerite Yourcenar consigne dans cet ouvrage vingt-deux de ses rêves, formés entre sa vingt-huitième et sa trente-troisième année.
Des rêves, ces récits ont l’étrangeté et le caractère décousu, même si parfois ils ont une précision qui paraît incompatible avec le flou qui accompagne le réveil. C’est que bien entendu l’écriture a pris le dessus sur la rêverie, et génère des textes qui tiennent du poème en prose : rythme, sonorités, une sorte de solennité magique.
Le paysage onirique est souvent composé de cathédrales, de châteaux, mais aussi de maisons dans des humbles villages ou de vastes espaces mystérieusement blancs en plein été.
La narratrice est parfois mise en présence d’autres personnages, fantomatiques ou familiers. Certains reparaissent d’un songe à l’autre, donnant le sentiment d’un monde parallèle.
Parfois le rêve tourne au cauchemar, voire à l’épouvante.
Bien que l’époque connaisse la grande vogue freudienne, Marguerite Yourcenar se défend de vouloir analyser ses rêves comme une manifestation de son inconscient. Elle s’en explique dans une longue préface où elle ironise sur les « Clés des Songes ». Tout au plus reconnaît-elle, paraphrasant un adage courant, qu’à 40 ans, on est responsable de ses songes, et qu’ils traduisent une certaine fatalité, présente dans le titre.
Un réservoir de motifs narratifs dont l’écrivaine débutante s’inspirera sans doute dans son œuvre monumentale.