L’album de la révélation ! Décrochant un prix certes mérité (Le Grand prix de la critique ACBD, entre autres), mais on est tout de même en droit de se demander pourquoi la révélation n’a pas eu lieu avant cet ouvrage, qui inaugure un style graphique très différent de ce qu’il avait fait précédemment, même s’il émergeait déjà dans « Carnet du Pérou », un journal de bord témoignant de l’irruption d’un certain réalisme.
Fabcaro va en effet opter pour un dessin plus réaliste tout en conservant le même minimalisme, un dessin plus froid aussi, où les personnages apparaissent quasiment dépourvus d’expressions. Seul l’humour des textes demeure, produisant un décalage encore plus grand et renforçant l’absurdité des situations. Et pour ce qui est de l’absurdité, on est servis avec « Zaï Zaï Zaï Zaï » ! Fabcaro se met en scène dans une sorte de thriller improbable, prenant comme point de départ l’oubli par notre héros de sa carte de fidélité au moment de régler ses courses. De là va s’ensuivre une course poursuite effrénée entre la police et le « délinquant », car dans ce monde fictif qui ressemble beaucoup au nôtre, ne pas avoir sa carte de fidélité constitue un crime impardonnable !
Autant l’avouer, le trait n’a pas le même charme que le dessin des débuts, il est même difficile de le trouver remarquable. De plus, Fabcaro use et abuse de l’itération iconique, même si heureusement son sens de la punchline et sa façon particulière de glisser ses états d’âme et ses préoccupations d’auteur de BD compensent avec drôlerie cette tournure graphique un peu revêche.
Fort logiquement, l’auteur va reprendre cette formule qui lui a réussi pour la suite de sa production (« Et si l’amour c’était aimer ?», « Open bar », jusqu’au récent « Moon River »…) mais on ne peut s’empêcher de regretter les petits mickeys d’avant et leur puissance comique.
Blue Boy - Saint-Denis - - ans - 23 juin 2022 |