Pixley Mapogo
de Tore Renberg

critiqué par Pucksimberg, le 8 décembre 2015
(Toulon - 44 ans)


La note:  étoiles
Quel tour de force !
Comment Jarle Klepp voit-il va vie basculer quand il voit sa fille blonde coucher avec un homme noir en pleine nature ? C'est sur cet épisode qu'est construit ce roman qui se déroule sur une seule nuit, qui semble condenser de nombreux éléments sources de tourments.

Jarle Klepp est journaliste et il est chargé de rédiger un article sur un concert mythique, celui des Smiths qui viennent de se reformer. Le concert se déroule en Norvège et dix mille fervents admirateurs sont venus pour voir ce groupe mythique qui a enchanté leur jeunesse. Jarle n'est pas seul, il est venu avec des amis et prend conscience que cet événement pourrait être l'un des plus marquants de son existence. Il aurait pu savourer tranquillement ce concert si un besoin urgent d'uriner ne s'était fait sentir. Le voilà obligé d'aller aux toilettes à quelques secondes du début du concert. Sur le chemin du retour, il voit un couple faire l'amour, une jeune fille blonde, et un homme noir. Est-ce un viol ou un simple moment de jouissance festif ? Il s'interroge et conclut que ce plaisir est bien partagé. Quel choc quand il découvre la visage de la jeune fille ! Il s'agit de sa fille. Ce concert mythique, tant attendu, devient le siège d'un bouleversement de sa vie personnelle.
A cela s'ajoute la mélancolie grandissante de son meilleur ami, présent lui-aussi au concert ...

Ce roman possède une belle narration et n'ennuie pas une seule seconde le lecteur. Nous suivons cette nuit endiablée et observons comment un simple homme peut réagir de manière concrète face à une telle scène. Voir sa fille dans une telle situation semble traumatisant, à cela s'ajoute un racisme ambiant, tout de même peu appuyé. Il ne se dit pas raciste mais lorsqu'il se trouve dans une telle situation, tout d'un coup ces valeurs défendues sont ébranlées. Tout d'un coup, des pans de son passé sont réveillés, qui ne mettent pas toujours en valeur le personnage principal. Ce dernier ne s'affirme pas pour autant comme un homme raciste. Il se dit même très ouvert, mais face à une situation concrète, il se sent désemparé.

Quel tour de force de raconter une seule nuit en 250 pages ! On suit les pensées du personnage, les moindres mouvements de ses pensées. Tore Renberg parvient à instiller du suspense, même à rendre certains passages stressants. Il parvient aussi à retranscrire l'atmosphère d'un concert et surtout l'attente avant le spectacle d'une manière très juste. D'une manière générale, ce roman touche de nombreux thèmes, celui de la paternité, de la différence, de la sexualité, de la musique, de l'esprit d'enfance et de la maturité, de notre rapport à l'autre, mais c'est surtout de l'homme dont il est question.

Il s'agit d'un très bon roman. Tore Renberg est très lu en Norvège et ce serait lui rendre justice que de le lire.