En première page , Alain Mabanckou présente ainsi son roman : « En hommage à ces errants de la Côte sauvage, qui , pendant mon séjour à Pointe Noire, me racontèrent quelques tranches de leur vie, et surtout à « Petit Piment » qui tenant à être un personnage de fiction parce qu’il en avait assez d’en être un dans la vie réelle »
Petit Piment devient alors personnage principal et narrateur, interrompant régulièrement le récit de l’aventure de sa vie pour relater le parcours de personnages secondaires, tout aussi pittoresques les uns que les autres, ou pour leur donner la parole, leur laissant alors le soin de se raconter.
Ce procédé de l’histoire dans l’histoire ne rompt en aucun cas l’intérêt de la lecture, les personnages s’intégrant parfaitement dans le récit. Ces orphelins, héros cabossés dès leur plus jeune âge, éclopés de la vie, qui errent, en quête d’un peu de répit et de douceur forment une fresque picaresque. Leurs misères, leurs tribulations sont racontées avec légèreté, sans pathos, souvent avec tendresse, toujours avec humour .
Mabanckou, et c’est là l’autre intérêt du roman, a pris soin de placer leurs infortunes dans le contexte politique du Congo , de ses conflits ethniques, de sa rivalité avec le Zaïre, et de son passage au socialisme . Cela vaut au lecteur dans la première moitié de l’ouvrage, des passages savoureux où l’auteur trace des portraits sans concession des représentants du PCT , Parti Congolais du Travail, en particulier du directeur de l’orphelinat, personnage imbu de son rôle, burlesque et ridicule dans ses tentatives de formater les esprits des orphelins, de les « conscientiser » par des discours ampoulés truffés des grands mots clés de la Révolution.
Une lecture agréable , où la saveur du discours imagé des personnages, révélateur de leur culture, de leurs traditions animistes, se mêle à la froide et conventionnelle rhétorique des nouveaux maîtres politiques .
Un savoureux voyage au Congo .
Alma - - - ans - 24 octobre 2015 |