Chemins
de Michèle Lesbre

critiqué par Alma, le 27 juillet 2015
( - - ans)


La note:  étoiles
Errances sur les chemins du souvenir et de la quête
Un homme assis sur un trottoir qui lit SCENES DE LA VIE DE BOHEME, d’Henry Murger, un livre que Michel Lesbre a toujours vu sur le bureau de son père, dont il disait qu’il était « toute sa jeunesse, » incite l’auteure à rompre avec son quotidien pour partir , sans planning précis , sur les traces de ce père « intime étranger » qu’elle a peu et mal connu . « Je me demandais si la lecture des SCENES DE LA VIE DE BOHEME m’aiderait à faire un bout de chemin jusqu’au jeune homme qu’était mon père lorsqu’il lisait ce livre , si elle m’aiderait à percer le mystère qu’il est encore pour moi »

Le livre traduit ses errances sur des chemins de traverse, le long des routes tranquilles, au bord d’un canal, là où « un détail, une rencontre, une réminiscence me feraient dévier de ma route et me mettraient sur des chemins buissonniers », ses pauses en compagnie d’inconnus rencontrés ( un éclusier, un couple de mariniers, une gardienne de vaches, un chien , un couple d’éclusiers qui « avaient dans les yeux des jours et des nuits d’une grande douceur ») , laissant alors le temps s’étirer et partageant avec eux quelques heures de plénitude .
On y lira aussi la découverte de villages ou de maisons liées à sa famille , lieux où dans des moments d’entre deux , son esprit passe « d’un temps à un autre », où des images fugitives lui donnent l’impression « d’errer dans deux mondes à la fois » de « marcher dans un monde palimpseste où il est agréable de ses perdre »

Une intrigue de peu de matière, me direz-vous, mais c’est en cela que réside tout le charme de l'ouvrage . On peut alors se laisser prendre par la douceur de ce voyage impressionniste, se rendre disponible à l’accueil de l’évocation multisensorielle des paysages traversés . L’univers que peint Michèle Lesbre est une symphonie en mode mineur de mouvements souples, de brumes ouatées, de bruits assourdis et de parfums veloutés. Le rythme de ses phrases est fluide, comme calqué sur « le monde souple et lent de la péniche »

Un récit à lire à l’ombre d’un arbre , loin du bruit des villes, dans la douceur d’un après-midi d’été.