Un empoisonnement universel : comment les produits chimiques ont envahi la planète
de Fabrice Nicolino

critiqué par Guigomas, le 14 novembre 2014
(Valenciennes - 54 ans)


La note:  étoiles
Le fond de l'air effraie vraiment
Distilbène, dioxine, gaucho, PCB, DDT, phtalates, bisphénol A… tous ces noms emplis de poésie désignent des produits chimiques qui, s’ils ne sentent pas tous le soufre, font bien plus que piquer les yeux. Eux et leurs dizaines de milliers de semblables ont envahi pour longtemps la moindre parcelle de notre Terre, la moindre goutte d’eau, le moindre courant d’air. Sans oublier notre propre sang, qui charrie plus de saloperies que le Vidourle après une pluie cévenole.

C’est ce constat désespérant ou terrifiant que dresse Fabrice Nicolino au fil d’une enquête passionnante et solidement étayée que je vous recommande de lire, de faire lire et de faire acheter par vos bibliothèques de quartier. Le fait est que ça craint carrément et que, du café matinal que nous préparons avec de l’eau du robinet au dentifrice à l’air innocent qui nous récure les ratiches avant le coucher, nous sommes perpétuellement soumis aux perturbateurs endocriniens, cancérogènes, résidus de médicaments, traces de pesticides, et j’en passe pour ne pas vous stresser davantage… Comment en est-on arrivé là ?

Tout s’emballe vraiment au XIXème siècle avec la synthèse fortuite de l’urée par un chimiste allemand. Jusque-là, les chimistes étaient de gentils et innocents sorciers qui s’efforçaient de transformer le plomb en or, la chimie était minérale. Avec la synthèse de l’urée, on découvre les fantastiques possibilités de combinaisons qu’offre le carbone, véritable brique de base d’un jeu de construction infini dans lequel s’imbriquent également l’oxygène, l’hydrogène, l’azote mais aussi le chlore, le brome, etc… Les premiers produits synthétisés sont des colorants puis, rapidement, des pesticides. Les premières sociétés chimiques voient le jour, elles existent encore aujourd’hui : Bayer, BASF, Dow, DuPont…
Il va sans dire que, dans les deux guerres mondiales, ces géants sauront voir les opportunités .

Aujourd’hui, leurs produits sont partout, vraiment partout. Et on sait l’impact qu’ont ces produits sur l’environnement (disparition des abeilles, des passereaux de nos campagnes) et sur l’homme (Alzheimer, cancers, chute de la fertilité, malformations congénitales). On le sait vraiment, l’auteur cite de nombreuses études démontrant qu’on sait que beaucoup des produits qu’on utilise encore ont des effets extrêmement dévastateurs. Mais l’auteur démontre aussi la malignité des industriels de la chimie et la complaisance (ou la passivité) des autorités.

C’est donc d’un livre essentiel qu’il est question ici, dense et riche d’informations mais qui se lit très facilement car l’auteur, en plus, a du style et écrit d’une plume alerte (oui, alerte, je pense que c’est le mot qui convient).