Les poilus d'Alaska, tome 1 : Moufflot, Hiver 1914
de Michael Delbosco (Scénario), Daniel Duhand (Scénario), Félix Brune (Dessin)

critiqué par Bluewitch, le 14 septembre 2014
(Charleroi - 44 ans)


La note:  étoiles
Des chiens esquimaux héros de guerre
Hiver 1914. La Première Guerre mondiale commence à fissurer l'Europe et à étendre son lot de misères, de morts et de peur. En plus des conflits armés, ce sont les conditions météorologiques qui déstabilisent le peuple et les soldats, les fragilisant de façon dramatique.

Attachée à ses techniques traditionnelles de combat, la France devra pourtant se résoudre à accepter cette mission folle et ingénieuse proposée par le capitaine Moufflot : faire revenir 400 chiens de traineau depuis Nome, en Alaska, afin de réinvestir les régions montagneuses enneigées de façon plus efficace.

Dans ce premier tome, on voit Moufflot perdre son bataillon de chasseurs alpins au cœur des Vosges, lui-même étant grièvement blessé au point d'être déclaré comme décédé à son épouse. Fait prisonnier par l'ennemi, il s'échappe après avoir été soigné et rejoint l'état-major avec son projet en tête.

Basée sur une période de l'histoire initialement classée secrète, cette aventure de chiens esquimaux au sein du conflit est remise au goût du jour par l'actualité. Arte en a d'ailleurs fait un reportage et cette bande dessinée en propose une vision un peu romancée. Quelques changements de noms et accroches dramatiques supplémentaires (captures, blessures, romances et trahisons) en font un récit soutenu et intéressant à lire. Le graphisme et la mise en page restent assez conventionnels mais on notera une mise en couleur tout à fait adaptée au propos.

Cette tranche de l'histoire est effectivement surprenante et permet de mettre l'accent sur l'esprit astucieux et aventureux de quelques hommes, à une époque où l'armée et ses habitudes s'embourbent dans une impasse stratégique. Le personnage de Moufflot, quant à lui, est loin d'être attachant : increvable et jusqu'au-boutiste, certes, mais aussi violent, égoïste et machiste (voire misogyne).

L'album est agrémenté de quelques planches du second tome et d'un dossier en fin d'ouvrage : on y découvre l'aventure des "vrais" héros de l'Histoire (dont les noms d'origine sont assez semblables à ceux des personnages de fiction, nous rappelant ainsi la proximité entre les deux), documents d'époque et photos à l'appui.

L'année 2014 aura été le terreau d'un grand nombre de rétrospectives, documentaires, fictions et commémorations. Si la graine d'inspiration des "Poilus d'Alaska" est effectivement attractive, son traitement de qualité, on garde l'impression que, parfois, l'aspect "basé sur une histoire vraie" ne suffit pas à en faire un récit d'une grande originalité. L'attrait tiendra surtout dans la documentation fouillée, la justesse du texte, et d'avoir eu le mérite de revenir sur une tranche méconnue de la Grande Guerre.