Le ventre arraché
de Aurélie Monkam-Noubissi

critiqué par CHALOT, le 21 avril 2014
(Vaux le Pénil - 76 ans)


La note:  étoiles
leçon philosophique émouvante
« Le ventre arraché »
Livre d’Aurélie Monkam Noubissi
Editions Bayard
188 pages
Avril 2014
Le « vivre ensemble » serait-il une utopie ?

La réponse à cette problématique centrale est apportée bien avant la fin du livre.
Le lecteur sent dès le début que l’auteure n’est pas n’importe qui…. C’est une femme digne, forte qui a, malgré sa profonde et incommensurable douleur une philosophie de vie peu commune.
L’histoire commence comme un drame-et c’est un drame-et se poursuit comme une leçon de vie.
Comment est-ce possible ?
Deux jeunes adultes d’une vingtaine d’années, dont le fils de l’auteure sont sauvagement frappés à Echirolles près de Grenoble par une bande de jeunes de la cité voisine.
Cela se passe le 28 septembre 2012 .
Ce n’est pas du cinéma, la violence est extrême et les coups donnés entraînent la mort de ces jeunes qui avaient la vie devant eux..
Comme le titre le montre , ce livre exprime avec force la violence du chagrin d’une mère qui ne comprend pas et pour cause le pourquoi d’une telle agression.
Camerounaise d’origine, pédiatre par choix, Aurélie Monkam Noubissi nous présente son enfance, les contraintes professionnelles qui l’ont conduite en France et son cheminement de pensée.
Ce livre émouvant et bouleversant est une œuvre philosophique
« Comment peut-on définir un parcours d’intégration ? Si l’on veut simplifier, on peut dire qu’il s’agit de nous conformer aux règles du pays qui nous accueille, qui assure notre formation professionnelle, nous permet de nous émanciper. Nous y sommes devenus des adultes matures et responsables, nous avons éduqué nos enfants dans le respect des règles de la nation, nous nous sommes confrontés, sans esprit vindicatif, je veux dire sans recourir à la posture de certains qui pensent que le France est redevable à ses anciennes colonies…. »
Qu’ajouter de plus à ce plaidoyer de l’intégration républicaine !
L’auteure essaye de comprendre, sans colère ni soif de vengeance ce qui a pu conduire des jeunes à tuer d’autres jeunes, qu’ils ne connaissaient même pas.
Son chapitre « A propos d’éducation et de comportements violents » constitue une réflexion profonde construite sur une argumentation solide, prônant l’autorité opposée à l’autoritarisme et le dialogue en famille.
Elle garde l’espoir en l’avenir de l’humanité .
Les soutiens que ses proches lui ont apportés, sa personnalité et sa foi, simple et profonde -on est loin de la bigoterie- sont des tuteurs puissants pour continuer à vivre sans oublier avec l’espérance qui l’habite et qui doit nous habiter.

Jean-François Chalot