Corps du roi
de Pierre Michon

critiqué par Darius, le 25 juillet 2003
(Bruxelles - - ans)


La note:  étoiles
Flaubert, Hugo, Faulkner et quelques autres
Désarçonnant ce livre, c’est le moins que l'on puisse dire !
Rédigé par un détenteur d'une maîtrise à la faculté des lettres de Clermond-Ferrand, l’auteur a décidé de ne nous parler que d’éléments de vie d’écrivains.. Pierre Michon se justifie de cette façon : « Quand on va dans une librairie et qu’on prend un livre au hasard, que lit-on ?
Jean-Paul dit : - Comment vas-tu Jean-Pierre ?
Mais qui sont ces personnages ? Il faudrait lire tout le bouquin pour le savoir. Vous l'aurez compris, il ne faudra pas lire tout le bouquin pour comprendre de qui parle Pierre Michon dans son livre.
Limitons-nous à Flaubert : "Flaubert considérait l'art avec beaucoup de sérieux. Ce sérieux prête à rire. Il serre le cœur. Ce serrement de coeur qui prête à rire, c’est celui qu'on éprouve devant la misère. Flaubert est notre père en misère." "Qu’il n'y ait pas de bonne littérature, qu’on déduirait par opposition à une autre, mauvaise, c'est suggéré dans Madame Bovary. Homais affirme en effet qu’il existe de la mauvaise littérature, et on sait que tout ce que dit Homais relève de l’opinion, de la bêtise, de ce qui ne doit pas être." "Madame Bovary, c’est toutes les femmes. C'est ma mère. C’est les pleurs des femmes, la frustration terrible qui toujours va déborder, déborde." Encore et toujours Flaubert : "J’aimerais que s'il revenait, s’il dépliait devant moi les grosses moustaches, il me dise ce que disait sur le tard Lamartine : "Le bon public croit que j'ai passé 30 années de ma vie, à aligner des rimes et à contempler les étoiles. Je n'y ai pas employé 30 mois, et la poésie n’a été pour moi que ce qu'a été la prière".
"Etre la hache qui rompt la mer en nous", c’est ainsi que Kafka définissait la mission d'un livre. C'est moi qui ajoute cette petite pensée que j’ai découverte au fil de mes lectures. Elle résume peut-être ce que m'a apporté ce bouquin.
Détails de la vie d'auteurs et mort de sa mère 6 étoiles

Ces petits éléments de la vie des auteurs constituent leur second corps, à côté de celui, magistral, de leur oeuvre, un peu comme celui des monarques de droit divin.
Ces bribes de l'environnement et de l'existence de Flaubert, de Faulkner et de cet auteur arabe qui m'était - et me reste très largement - inconnu ne manquent pas d'intérêt, mais sont agencés sans grande rigueur, au gré de l'inspiration et de l'émotion de l'écrivain. Le dernier chapitre est touchant, mais j'ai du mal à le relier aux autres.

Ce livre contient des choses intéressantes, mais me semble forgé de bric-et-de-broc. J'en suis sorti assez déconcerté, visiblement à l'instar de Darius.

Veneziano - Paris - 46 ans - 31 décembre 2009


Pierre Michon c'est aussi "Des vies minuscules" 8 étoiles

Par petites touches, comme au pinceau fin, Pierre Michon reconstruit le fil de sa vie déchirée lorsqu'il était tout petit enfant par le départ de son père, disparu, volatilisé. Il remonte le cours de la vie de ses aieux, sculpte comme un orfèvre et peint des miniatures pour épingler ceux de ses ancêtres qui pourraient avoir un rapport si minime soit-il avec ce père qu'il n'a pas connu, et tente de comprendre. Chaque phrase, chaque mot comptent et nous effleurent d'une caresse dont on s'aperçoit plus tard qu'elle nous a brûlé. Chaque histoire est un petit bijou. Merveilleux livre, merveilleux Pierre Michon qui d'une douleur fait une oeuvre d'art.

Maria-rosa - Liège - 68 ans - 8 juillet 2004