L'apocalypse des travailleurs
de Valter Hugo Mãe

critiqué par Radetsky, le 4 juin 2014
( - 81 ans)


La note:  étoiles
Saudade...
On achève la lecture de cet ouvrage avec le sentiment du "je m'en doutais...", tant le poids de la condition sociale pèse sur Maria da Graça l'héroïne du roman. L'écriture de Valter Hugo Mae est dans la droite ligne de son grand aîné José Saramago, avec des procédés stylistiques, un rythme, une ponctuation qui constituent un hommage évident rendu à ce dernier.
Mais le ton change chez Mae : là où Saramago savait tisser un réseau d'ironie, de malice, de gaieté, d'espoir tenace afin d'envelopper, défier et vaincre le destin parfois trop évident qui pesait sur ses héros, nous avons affaire à la machine déterministe impitoyable d'une époque (la nôtre) qui ne se donne même plus le scrupule de mentir à ses victimes.
Oubliée la "révolution des oeillets" de 1974, on retombe dans la réminiscence et la répétition douloureuses des vies conduites sans espoir ni rétribution, où les revirements apparents du sort s'inscrivent dans la continuité d'un non-avenir.
Le petit prolétariat d'une petite ville portugaise vivote plutôt mal que bien, avec ses pauvres expédients où rien ne rachète la médiocrité de la vie, des sentiments, des êtres, du sentiment amer qui plane sur toute chose. Les protagonistes sont pris comme des rats faisant tourner la roue dans laquelle ils sont enfermés et où rien semble n'avoir jamais changé depuis que le monde est. L'espoir existe pourtant, d'abord indistinct, mal formulé, mal identifié, opérant par à-coups, par éclairs furtifs ; et lorsqu'il se révèle... c'est trop tard. Ce n'est pas ça, pas maintenant, pas de cette manière.