Les mains libres
de Paul Éluard, Man Ray (Dessin)

critiqué par Septularisen, le 24 septembre 2013
(Luxembourg - 56 ans)


La note:  étoiles
LIRE LA POÉSIE SURREALISTE
LA LECTURE

Au centre de Paris
La pudeur rêvassait

Le bouquet du ciel sans nuages
Dans un vase de maisons noires

Quand elle n'a pas le temps
Elle n'en est que plus belle

On n'en finit pas d'apprendre
Le ciel ferme la fenêtre
Le soleil cache le plafond.

Ce recueil de poésies est une collaboration entre deux des grandes figures du surréalisme français, à savoir l’écrivain et poète Paul ÉLUARD et le photographe et peintre Man RAY. Alors que d’habitude les poèmes sont illustrés, ici et conformément à l’esprit surréaliste c’est… l’inverse, et ce sont les dessins de Man RAY, qui sont mis en poésie par Paul ÉLUARD.

Le résultat est somme toute très étonnant, puisque au texte sur la page de gauche semble « répondre » le dessin sur la page de droite, et vice-versa. Un peu comme un jeu de miroirs, une résonance, un dialogue entre le dessin et le texte.

Il est bien sûr difficile d’expliquer tout cela, dans une critique, sans pouvoir montrer les dessins.
Disons qu’en règle générale la poésie est simple facile à lire. Les poèmes sont parfois très courts (une ou deux lignes), d’un seul trait avec un aspect peu dégrossi, parfois même un peu vulgaire ou d’un érotisme très fin et très caché, sans aucune ponctuation et bien sûr, tout à fait dans la lignée surréaliste.
Ainsi p. ex. : La tour Eiffel est penchée // Les ponts tordus // Tous les signaux crevés…

Le livre se présente, dès lors, comme une sorte de chemin initiatique à arpenter pour accéder à la poésie surréaliste et sans doute au dialogue entre les deux auteurs… Mais comme toujours avec la poésie tout cela n’est que de la théorie et mieux vaut laisser la place à l’émotion et à l’auteur…

FEMME PORTATIVE

D’un effet solennel dans la solitude

Terrestre dérision la femme
Quand son cœur est ailleurs

Si ce que j’aime m’est accordé
Je suis sauvé

Si ce que j’aime se retranche
S’anéantit
Je suis perdu

Je n’aime pas mes rêves mais je les raconte
Et j’aime ceux des autres quand on me les montre.

Une fois n’est pas coutume, un grand bravo aux éditions Gallimard pour ce très beau livre de poche, avec une qualité de papier supérieure et des dessins superbement restitués, malgré le petit format du livre…

SOLITAIRE

J'aurais pu vivre sans toi
Vivre seul

Qui parle
Qui peut vivre seul
Sans toi
Qui

Etre en dépit de tout
Etre en dépit de soi

La nuit est avancée

Comme un bloc de cristal
Je me mêle à la nuit.