Lettres
de Jean-Jacques Rousseau

critiqué par Elya, le 8 septembre 2013
(Savoie - 34 ans)


La note:  étoiles
Autobiographie de Rousseau : quelques lettres choisies
Dans Les confessions, et surtout dans les derniers livres, Rousseau nous confie des extraits de lettres qu’il a envoyé et reçu au cours de sa vie. Comme je cherche à lire l’intégralité de l’œuvre de Rousseau, et que j’apprécie particulièrement ses écrits autobiographiques, j’ai acheté chez un bouquiniste ce vieux livre, en très bon état, et dont l’odeur, les textes et les images qu’il renferme ravissent déjà lors d’un feuilletage.
Un certain Marcel Raymond (sans doute spécialiste de Rousseau, car il a je crois aussi participé aux éditions de La pléiade), au milieu du XXème siècle, a réunit en ce volume des lettres dont Rousseau est l’expéditeur. Il a volontairement sélectionné les moins « théologiques » ou « philosophiques », précise-t-il en préface, afin d’éclairer plutôt la « nature » de l’homme. Chaque chapitre, rassemblant des lettres disposées par ordre chronologique, est précédé d’une petite introduction, racontant brièvement quelques éléments biographiques et bibliographiques qui ont accompagné cette période. Certaines parties sont aussi agrémentées d’estampes ou de photographies de lieux et scènes qui ont marqué la vie de Rousseau. Marcel Raymond se contente le plus souvent de préciser qui sont les destinataires, ou de rappeler brièvement le contexte dans lequel les lettres ont été écrites.

Rousseau écrit vraiment à des gens très différents (de la jeune femme au vieux religieux), par les liens qui les unit tout autant que par la profession (philosophes, libraires, commerciaux, hommes d’églises, domestiques…), ou l’implication sociale (rois, politiciens…).
J’ai relevé six lettres (sur une centaine que contient le recueil, je pense) dont le contenu m’a vraiment marquée. Pour certaines, Rousseau y précise ses méthodes d’élaboration de textes, et l’attention qu’il porte envers le choix de chaque mot constituant une phrase, même si elles constituent le corps de ces romans. Il cherche à ce qu’elles soient toutes mélodieuses, quitte à s’arranger quelque peu avec les règles orthographiques.
J’ai apprécié aussi celles où il décrit longuement les paysages de Môtiers, vallée Suisse reculée, dans le massif Jurassien, où il séjourna plusieurs mois. Grâce à ses expéditions et son observation constante de la nature, il en vient à comprendre certains phénomènes géomorphologiques tels que les phénomènes de captures des cours d’eau, que j’ai personnellement eu du mal à saisir même avec de nombreuses lectures d’ouvrages clairs de géologie ! De l’importance de l’observation et de l’expérimentation dans l’élaboration de la connaissance, là n’est pas le sujet, il en parlera longuement dans Emile ou de l’éducation.
La lettre la plus séduisante et la plus maline est peut-être celle qu’il écrit à Voltaire en 1755, en réponse à un courrier riche en reproche de ce dernier.

Plus on avance dans le temps, et plus Rousseau écrit des lettres où il dénonce les abus et complots supposés des personnes qui lui étaient chères précédemment. Je sais que certaines personnes ont pu trouver cela agaçant dans Les confessions, et ici, cela doit l’être aussi, même si personnellement, je n’y porte pas trop attention.

Je ne sais pas s’il existe un recueil exhaustif des Lettres de Rousseau. En tout cas, cet ouvrage m’a déjà bien contentée.