La malédiction Lapérouse
de Collectif

critiqué par Grégoire M, le 31 mars 2013
(Grenoble - 49 ans)


La note:  étoiles
A conseiller aux curieux de toutes sortes
Il s’agit d’un recueil de documents historiques liés au voyage de découverte du Comte de Lapérouse dans l’océan pacifique de 1785 à 1788 et de sa fin tragique lors d’un naufrage dans l’archipel des Iles Salomon.
Dans le même livre sont recueillis ( sur 1100 pages tout de même):
- les instructions de Louis XVI,
- le journal de bord de Lapérouse (qu’il a pu faire parvenir lors de certaines étapes, la dernière à Botany Bay en Australie 3 mois avant le naufrage présumé),
- sa dernière lettre,
- les récits des expéditions de recherche de Peter Dillon et de Dumont D’Urville,
- les dernières découvertes récentes lors de fouille archéologique sur le site du naufrage.
Ces documents sont pleins de découvertes pour un curieux et néophyte. Il y a bien sûr le récit du voyage en lui-même, sa tragédie. Mais l’intérêt des documents s’étend bien au-delà, je citerais pêle-mêle :
- un aperçu de la personnalité de Louis XVI qui transparaît dans ses instructions, un « bon roi » soucieux de la santé des équipages et d’apporter les bienfaits de l’Europe aux indigènes,
- la vision des enjeux scientifiques de l’époque, de la cartographie, la considération que l’on portait à ses voyages d’exploration,
- les conditions de navigation de l’époque, la vie à bord, les difficultés de navigation à bord d’un vaisseau à voile de grande dimension peu maniable, la peur du naufrage dans ces zones non cartographiées, les besoins de ravitaillement en eau, en nourriture, la peur du scorbut, l’entretien des navires,
- les conditions de vie dans les colonies européennes d’Amérique ou d’Asie, Lapérouse n’hésite pas à porter un regard très critique sur la gouvernance des colonies et le comportement des religieux,
- les relations avec les indigènes (le mythe du bon sauvage en prend un sacré coup). C’est sans doute le point qui m’a le plus intéressé, découvrir des sociétés, des comportements si différents des nôtres, de la plus simple innocence, aux comportements les plus guerriers, l’absence d’interdits moraux concernant le vol, la sexualité, le meurtre. Le récit de ces premières rencontres entre des européens et des peuples indigènes est riche de questionnements. Quant-au récit de Peter Dillon lors de sa recherche des naufragés, 40 ans après la disparition, il nous montre combien ses relations se sont modifiées, l’incompréhension des premières rencontres a reculé, laissant place aux premiers commerces, aux alliances, aux tentatives d’évangélisations...
Enfin, il y a le plaisir de découvrir ses documents tel qu'ils ont été écrits, avec la compréhension et les préjugés de l'époque, sans l'interprétation d'un romancier ou d'un historien. L’écriture des documents est très accessible avec une mention spéciale pour le récit de Lapérouse d’une écriture claire et très actuelle. Il y a bien sur des longueurs dans la description des côtes, les repérages cartographiques, il peut être utile de savoir sauter des pages par endroit.