Les Artichauts
de Momo Géraud, Didier Jean (Dessin), Zad (Dessin)

critiqué par JulesRomans, le 24 décembre 2012
(Nantes - 65 ans)


La note:  étoiles
Sècher ses larmes à défaut de pouvoir sécher celles de sa mère
Voilà un album qui, par le fait qu’il s’agit d’un titre pour les enfants d’école primaire abordant le sujet des femmes battues, mérite d’être signalé. Didier Jean et Zad ont fondé en 2010 leur maison d’édition 2Vives voix et c’est avec une autre Corrézienne qu’ils signent ce titre. Le sujet est traité avec pudeur, mais le contenu du texte et les illustrations rendent au mieux les pensées possibles d’une jeune enfant Jeanne qui voit sa mère frappée par un homme (dont on ne sait s’il est son géniteur ou le nouveau compagnon de sa mère). Jeanne ne fait pas que craindre les disputes, elle relève aussi les moments de tendresse réciproque entre les deux adultes.

Le texte sonne juste :
«Ce soir, nous mangeons des artichauts.
Je suis inquiète, il n’aime pas beaucoup les artichauts.
Quand j’ai su que Maman en préparait, j’ai pensé que ça allait faire des histoires.
Mais je n’ai rien dit.
Je me suis assise à ma place sagement, à gauche de ma mère, comme d’habitude.
Et j’ai attendu.
Peut-être que ce soir, il ne se passera rien.»

Un peu plus loin l’on suit Jeanne dans ses désirs de s’échapper de cette situation en se rêvant un futur joyeux de femme aimée :
« Un jour, c’est certain, je partirai.
J’aurais une maison grande avec des murs blancs.
Une maison sans cris. (…)
Des amis viendront, plein d’amis.
Un amoureux me dira des paroles douces.
Il sera beau, drôle et gentil.
Il me fera rire, me cajolera, me consolera.
Ce sera mon amour pour la vie ».

Au sujet des magnifiques illustrations, on citera ce qu’en dit Zad elle-même : « Je travaille essentiellement au pastel associé à la gouache. Cette technique mixte me permet de mêler une gestuelle vivante, des couleurs fortes et une transparence qui évoquent la fragilité de l’être humain, ses sentiments et ses mouvements si éphémères... Par opposition au pastel, médium délicat, que j’aime manipuler pour sa sensualité et sa fragilité, j’applique la gouache en à-plats fermes et sans retenue. La gouache, griffée, frottée, semée d’empreintes, amène cette texture granuleuse qui enrichit le pastel de volumes et de matières. J'utilise également l'acrylique sur bois, sur carton, sur papier froissé ou sur toile ».

Les pages documentaires sont à destination des adultes, ce livre a reçu l’appui de divers organismes dont la MGEN et la MAIF dont les adhérents sont des enseignants.