La Route de Bulawayo
de Philippe Aquin

critiqué par Libris québécis, le 2 décembre 2002
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
Une Afrique immuable
Philippe Aquin est le fils d'Hubert Aquin, un écrivain important du Québec qui s'est suicidé. L'auteur de la Route de Bulawayo vit en Suisse où il pratique le métier d'informaticien. Ce roman est son premier ouvrage.
Pour un premier essai, c'est réussi. Le lecteur est invité à suivre l'auteur en Afrique ainsi que son copain Nours, un Breton établi à Trois-Rivières, une ville du centre du Québec. Leur projet est de se rendre au fin fond de l'Afrique australe.
Ils partent donc en train de Johannesburg en Afrique du Sud à destination de Bulawayo, une ancienne ville importante de la Rhodésie, devenue le Zimbabwé. L'oeuvre n'est pas axée sur la réalisation de ce projet, mais sur ce que ces deux voyageurs découvrent.
L'auteur n'épargne pas le lecteur. On fait la connaissance de peuples qui pratiquent encore le sacifice d'humain pour s'attirer la bienfaisance des dieux, on fraternise avec des sorciers que les chefs de tribus supplient pour qu'il pleuve, on rencontre une femme attachante qui refile sa maladie vénérienne à Nours, on s'instruit sur l'incidence des colonisateurs qui ont dépouillé les noirs de leurs terres en échange des prières des missionnaires.
Bref, l'auteur raconte, mine de rien, tout ce que vivent ces peuples du coeur de l'Afrique. Et le temps qui passe ne change pas le cours de l'histoire comme le prouve un livre de Livingston écrit au dix-neuvième siècle que P. Aquin cite abondamment. Si l'Occident vit une période de mutation, l'Afrique connaîtra l'immuabilité à moins qu'on réussisse à véhiculer notre culture criminelle, comme le démontre l'assassinat de la pharmacienne qui a instruit les deux voyageurs sur l'âme africaine.
Le roman touche à l'essentiel sans dériver vers l'anthropologie ou la sociologie. L'oeuvre conserve son aspect romanesque et se donne même à l'occasion des accents humoristiques qui révèlent l'appartenance de l'auteur à la culture québécoise, humour qui fait parfois adolescent.