C'est un cercle d'amis étudiants à Lahore dans les années 60. La partition du Penjab (1947) n'est pas si loin et les échanges, les espoirs politiques des uns et des autres vivement partagés. Partagés aussi les confidences intimes, les émois et élans amoureux. Ainsi Dara follement épris de Jindié, le papillon d'or, rencontre nuitamment son jeune amour dans un jardin public grâce à la complicité de son ami Platon. Le poids des traditions, la rigueur des familles annihile toute possibilité d'union. Et la vie disperse ces compères aux 4 coins du monde. Jusqu'à ce que, 45 ans plus tard, Platon devenu artiste peintre célèbre et contestataire téléphone à Dara, lui rappelle sa dette morale pour l'aide à la nuit du Papillon d'or.. et lui demande d'écrire sa biographie ! Retrouvailles avec Zahid devenu un brillant chirurgien républicain aux Etats Unis. Il a épousé Jindié (le papillon d'or) et Confucius (frère de Jindié) garde rouge en Chine. Mais pas la moindre trace de nostalgie dans ce récit. C'est de l'actualité qu'il s'agit et l'occasion de brosser un portrait dévastateur du Pakistan que l'auteur ne cite jamais, lui substituant le terme de "terrepatrie". Un pays à la corruption inégalable où règne la terreur des mollahs (histoire de Zaynab mariée au Coran à seule fin de préserver le patrimoine familial), et l'activisme de l'Amérique et de l'Occident (la fausse victime de l'Islam mise en scène par les médias occidentaux). Tariq Ali pulvérise, asperge largement au vitriol du Pakistan à la Chine, à l'Amérique, à l'Europe, avec une mention particulière pour "l’intelligentsia"parisienne. L'humour est grinçant, sarcastique, les faits et les noms à peine voilés. Un style alerte pour une histoire bien charpentée et agencée mêlant satire, critique politique et amour. Ah!.. l'amour entre Dara et le Papillon d'or est, 45 ans après, toujours intact, sensible et.. platonique.
Lectio - - 76 ans - 10 août 2013 |