Sourires de loup
de Zadie Smith

critiqué par Esperluette, le 20 août 2002
(* - 51 ans)


La note:  étoiles
Londres est une métisse
C'est l'histoire de trois familles londoniennes : Les Iqbal, originaires du Bengladesh et immigrés de fraîche date; les Bowden-Jones, un couple mixte anglo-jamaïcain; et les Chalfen, des intellectuels prétentieux et survoltés.
Archie Jones et Samad Iqbal sont deux rescapés de la seconde guerre mondiale. Blessés physiquement et psychologiquement, ils sont devenus amis malgré leurs différences culturelles et intellectuelles. Chaque jour, ils se retrouvent au café O’Connell, leur second foyer. Leurs jeunes épouses, Alsana et Clara, s'en accommodent tant bien que mal. Et la vie va ainsi, cahin-caha, jusqu'à l'arrivée des enfants.
Les jumeaux, Millat et Magid Iqbal, séparés dès leur plus jeune âge, sont devenus aussi étrangers l'un à l’autre que s’ils étaient nés dans des familles différentes. Irie Jones, l'alter ego de Zadie Smith, est une jeune fille introvertie et complexée. Leurs parents respectifs sont totalement dépassés par les événements. C'est le moment que choisissent les Chalfen pour s’immiscer progressivement dans la vie familiale des Iqbal et des Jones au détriment de leurs propres enfants.
Encore un livre dont il est difficile de parler objectivement sachant qu’il a été salué par la presse du monde entier et récompensé par de nombreux prix littéraires.
En ce qui me concerne, j'ai plutôt bien accroché. Je l'ai trouvé parfois drôle, parfois cynique ou même triste. Zadie Smith a été comparée aux plus grands écrivains, et notamment, à Salman Rushdie. Il vrai qu’elle semble très à l'aise dans le travail d’écriture. De plus, je trouve qu’elle fait preuve d'une grande finesse psychologique car elle est parvenue à donner une réelle profondeur à chacun de ses personnages.
Quelle belle lecture ! 9 étoiles

Un roman complet, fascinant, riche, captivant, drôle, touchant ! Les aventures croisées des différentes familles suivent une mécanique ingénieuse et intelligente, qui m'ont séduit en tout point.

Les aventures de Samad et Archie à la guerre sont fabuleuses, et la famille Chalfen, sorte de Flanders intello-bobo, sont des passages clés et ont retenu mon attention, mon sourire et mes pensées.

Vraiment exceptionnel.

Soldatdeplomb4 - Nancy - 34 ans - 4 novembre 2010


Comme une Love parade littéraire 8 étoiles

C’est vrai ça ressemble étrangement à un bouquin écrit pour décrocher le Man Booker Prize : une grande histoire avec beaucoup de personnages qui fait au moins 400 pages. Mais voilà Zadie c’est une gamine toute jeune, issue de l’immigration - comme il est convenable de préciser maintenant - qui écrit avec le talent d’une vieille anglaise, mais avec un style très personnel, des histoires de son temps et de son quartier.
Zadie nous raconte la banlieue de Londres avec ses Jamaïcains, ses Pakistanais, ses Nigérians et autres exilés qui constituent une population cosmopolite qui essaie de vivre dans la meilleure harmonie possible. Son livre colle à l’image des grands défilés festifs qui agitent Londres régulièrement au rythme de la musique pop. Est-ce le livre d’une société où toutes les ethnies se sont fondues avec bonheur dans une même famille ? Est-ce le livre de la mort des cultures des ancêtres ? Zadie ne tranche pas, elle montre bien la nostalgie du pays abandonné, la douleur des coutumes et des mœurs oubliés, mais elle n’oublie pas que le métissage peut-être aussi un moyen de vivre dans les grandes métropoles au XXI° siècle.
J’ai aimé ce roman car Zadie, pour ses débuts, montre qu’elle est capable de conduire une grande histoire peuplée de personnage très finement analysés et très complexes. Ce livre démode toutes les grandes dames de la littérature anglaise et jette même une certaine ombre sur les Byatt, Trapido, Barker, Atkinson et autres… qui peuplent les gondoles des librairies anglaises actuellement. C’est un livre très contemporain qui l’on peut relier à l’œuvre de Kureishi faute de pouvoir la comparer à celle de Rushdie au moins pour le moment.

Débézed - Besançon - 76 ans - 10 mars 2008


mélange 10 étoiles

Je viens de finir la lecture de ce livre et sa longueur est vite passée inaperçue grâce à l'humour dont fait preuve l'auteure. J'ai adoré ce melting-pot d'Anglais, de Bengalis, de Jamaïcains, de couleurs (noirs, métis et blancs) et de religions (juifs, musulmans, témoins de jéhovah, et laïques), de classes sociales dans un quartier de Londres. Les questions de l'immigration et du mélange y sont traitées, ainsi que de l'identité et de son besoin éventuel. Le changement aussi, du bon vieux temps de la deuxième guerre mondiale, à travers la période de remise en question des années 60, au passage au deuxième millénaire, avec ses questionnements, notamment sur l'intervention de l'homme dans la vie (une "souris du futur"en est la protagoniste principale). Ce fut pour moi un véritable régal de voir traiter ces thèmes d'une telle manière. C'est avec grand plaisir que j'en recommande la lecture et que je vous invite à rencontrer les Iqbals, Jones et Chalfens.

Printemps - - 65 ans - 3 mai 2007


Brassage culturel 9 étoiles

Zadie Smith a écrit une fresque totalement baroque qui mêle ingénieusement des thèmes aussi variés et d’actualité que l’intégration, la quête (ou la perte) d’identité des immigrants, le racisme mais aussi la montée de groupuscules fanatiques, la recherche ou le rejet de sa propre culture et tout simplement le brassage culturel qui caractérise notre société occidentale actuelle. Et elle a réussi son pari avec brio.

Le côté baroque, les personnages hauts en couleur et le récit d’événements loufoques n’ont pas été sans me faire parfois penser à John Irving, même si le rêve est moins présent dans l’œuvre de Zadie Smith. Elle décrit des situations graves et des problèmes réalistes. On suit l’histoire de deux amis de guerre, Samad et Archie, et au travers d’eux le destin croisé de trois familles aux origines diverses : la famille Jones, composée de Archie, de sa femme d’origine jamaïcaine Clara et de leur fille Irie ; la famille Iqbal, Samad et sa femme, d’origine bangladeshi et leurs deux fils jumeaux, Millad et Magid. A ces deux familles, viendra s’ajouter la famille Chalfen.

La perte d’identité est à mon avis le fil conducteur du roman et se lit à travers les choix des différents protagonistes. Irie qui tentera en vain de lisser ses cheveux afros, Samad qui essaie de renouer avec sa religion, Magid envoyé par son père au Bangladesh afin qu’il renoue avec ses racines, Millad qui rejoindra un groupuscule d’extrémistes religieux ou encore Joshua Chalfen qui reniera le travail de son père, scientifique qui tente de découvrir une solution aux maladies par des expériences sur des souris, en rejoignant une association terroriste de défense des animaux.

Un magnifique roman, qui divertit mais éclaire en même temps sur la difficile situation des immigrés dans nos pays, qui doivent concilier leur culture d’origine avec la culture de leur pays d’accueil. Zadie Smith, elle-même moitié jamaïcaine, moitié anglaise, connaît son sujet. Une belle découverte.

Féline - Binche - 45 ans - 24 juin 2005