Des intellectuels jugent les médias : Tome 2
de Edgar Morin, Pierre Nora, Michel Onfray, Fernando Savater, Philippe Sollers

critiqué par Shelton, le 26 octobre 2011
(Chalon-sur-Saône - 67 ans)


La note:  étoiles
Pour réfléchir...
Peut-on commencer la lecture de ce travail par le second volume ? Oui, indiscutablement car ces deux livres ne sont que des interviews de personnes dites intellectuelles sur une problématique commune, les médias. Toutes les rencontres avaient été organisées par la revue Médias, ont déjà été publiées et il ne s’agit donc que d’une reprise, d’une anthologie, d’un recueil. Avant d’entrer dans le sujet, précisons bien que nous y retrouvons donc la patte acérée de Robert Ménard, un journaliste qui agace, qui énerve, qui révolte mais qui ne laisse pas indifférent. Dans le rôle d’intervieweur pour la télévision, on peut lui reprocher de couper la parole, de ne pas laisser son interlocuteur finir ses phrases… mais en version écrite, le ton est plus paisible, les réponses de chaque auteur plus complètes et c’est très bien ainsi. Donc, profitons-en !

Les auteurs ou intellectuels proposés sont très différents les uns des autres et je pense que les rapports que nous avons avec eux vont influencer grandement notre regard sur l’ouvrage, le fait de préférer le premier ou le second volume. On peut regretter que tout cela n’ait pas commencé quand certains grands penseurs du vingtième siècle vivaient encore car on aurait aimé avoir leurs points de vue à côté des contemporains de ce début de millénaire…

Pour chaque intellectuel interviewé, le même plan : une petite présentation d’une quinzaine de lignes pour situer le personnage, son action et son œuvre, le nom des intervieweurs, il n’y a pas que Robert Ménard, la date de parution dans Médias, quelques pages de jeu des questions-réponses, puis, en fin d’interview, une bibliographie d’ouvrages de références, « les indispensables » de l’auteur concerné.

La lecture est assez agréable, cela peut provoquer des envies de lectures complémentaires et nous n’échappons pas au questionnement lui-même. Que pensons-nous des médias ? Tenons-nous compte d’eux pour penser, agir ? Quel est notre profil médiatique ? Quels sont les rapports entre médias et démocratie ?

Comme les personnes questionnées ont des opinions fort différentes, l’ensemble est assez riche et inégal, aussi. Nous aurons donc nos chouchous et c’est bien normal !

C’est Edgar Morin qui a retenu le plus mon attention dans ce second volume. Je l’ai trouvé pertinent et assez objectif. A la question basique, « A quoi servent les médias ? », il répond tout de go : « A tout et son contraire ! »… C‘est à la fois simpliste, mais si vrai ! Heureusement pour la construction de la pensée, il embraye immédiatement sur l’intercommunication et la complexité, deux thèmes qui lui sont chers et qu’il a déjà beaucoup travaillés.

Pierre Nora est un intellectuel, indiscutablement, un grand monsieur, souvent oublié par le grand public. Sa présence est non seulement justifiée mais ses réponses devraient enrichir notre pensée. Ce grand historien condamne assez fermement les lois mémorielles, les célébrations médiatiques et la culture du superficiel. Il pense que la littérature va disparaître et il n’est pas très optimiste, c’est le moins que l’on puisse dire…

Enfin, si j’avais un troisième nom à citer, je prendrais Fernando Savater car je trouve que ce philosophe et penseur reste un très grand vulgarisateur. Ses réponses aux questions sur les médias l’illustrent parfaitement et on aurait presque l’impression de devenir intelligent… mais ce n’est qu’une impression, bien sûr !

Un bon ouvrage à garder dans sa bibliothèque pour alimenter nos pensées et réflexions sur les médias au moment où tout le monde affirme, probablement un peu rapidement, que nous sommes dans une société médiatique… Mais ce n’est, peut-être, qu’une illusion, allez savoir ?