L'observatoire
de Edward Carey

critiqué par Esperluette, le 20 juin 2002
(* - 52 ans)


La note:  étoiles
Vous avez dit bizarre?
Il est bien rare qu'un premier roman suscite autant d'enthousiasme. Et pourtant, son auteur, Edward Carey, est déjà considéré « comme l'une des voix les plus originales de la nouvelle littérature anglaise » (Cédric Fabre). Mieux, on n'hésite pas à le comparer à un Jarry ou à un Kafka.

L’observatoire est une œuvre dédiée à la mémoire. Edward Carey y brosse le portrait d’une petite communauté, vivant recluse dans une ancienne maison de maître. Tous les personnages se distinguent par leur bizarrerie. Parmi les habitants du manoir, il y a une amnésique qui se prend pour un chien, un ancien précepteur suintant et déliquescent, une vieille romantique collée à son tube cathodique, une orpheline myope comme une taupe, et le narrateur. Lui, c'est Francis Orme, le fils de la maison et, sans doute, le plus barjo de tous. Non seulement, il est cleptomane, menteur et fainéant; mais, en plus, il est d’une méchanceté primaire.
En dépit de la drôlerie des situations, le roman est dominé par une ambiance étrange, un malaise persistant. Edward Carey est un écrivain fantaisiste, mais sans complaisance. Son écriture, très travaillée, connote une grande subtilité… L’observatoire est, selon moi, une œuvre qui mérite son succès.
Les hommes à la loupe 8 étoiles

Dans cet observatoire rien ne va plus ! Autrefois magnifique manoir, ce lieu est désormais un observatoire dans lequel ont été conçus une vingtaine d'appartements. Seul le quart de ces demeures est habité par des êtres originaux et monomaniaques. Le narrateur Francis Orme porte des gants blancs et enrichit régulièrement une collection d'objets trouvés ou volés qu'il classe en imaginant le passé et l'histoire de ces trésors. Il y a aussi une femme-chien qui se comporte comme l'animal cité précédemment, une femme dépendante de sa télévision qui a fait des personnages de séries TV sa propre famille, un vieux précepteur transpirant, les parents de Francis Ome plongés dans un mutisme total ... Ce petit monde est bouleversé par l'arrivée d'une nouvelle, très vite considérée comme une intruse et qu'il faut chasser au plus vite. Mais cette dernière a du caractère et saura s'imposer dans ce petit monde.

Ces êtres sont seuls, peu bavards, sauvages, durs dans leurs propos, ils n'en sont pas moins sympathiques pour le lecteur, à condition d'accepter de côtoyer durant tout ce roman des êtres atypiques. Les portraits sont plaisants, pittoresques et permettent au lecteur de se familiariser avec des personnages qui pourraient tout à fait appartenir à une galerie de "monstres". La solitude n'est pas peinte comme une dure souffrance, le lecteur a parfois le sentiment qu'un éloge en est fait. Le roman n'est pas angoissant, au contraire le lecteur sourit parfois, reste aussi intrigué durant toute sa lecture agréable par la brièveté des chapitres qui permettent de passer d'un être à l'autre.

Quelques dessins de l'auteur accompagnent ce roman et cernent parfaitement les individus.

Le roman est bien construit et interroge le lecteur. Le regard est privilégié ( observatoire, jumelles, lunettes ...), les personnages sont passés au microscope afin de décortiquer leur comportement. Lorsque le retable d'une église sera décrit, le lecteur semble invité à tisser des liens entre les figures religieuses et les personnages de l'Observatoire.

Ces êtres différents, névrosés et étranges ne sont pas sans rappeler les hommes dans leur banalité commune ( solitude, amour, incommunicabilité, maladie, famille ... ).

Roman captivant et original pour des lecteurs acceptant d'entrer dans un univers singulier, éloigné d'un simple réalisme. Le lecteur qui se plaît à rencontrer des êtres originaux sera séduit par ce roman.

Pucksimberg - Toulon - 44 ans - 18 septembre 2012


Montagnes russes 5 étoiles

Le personnage principal porte des gants blancs. Un curieux monsieur installé dans un ancien Observatoire, devenu lieu de résidence pouvant accueillir des dizaines de familles. Seulement sept personnes y vivent encore et l’immeuble menace d’être démoli. Francis, le héros, n’entend pas se laisser déloger et il protègera son espace vital à tout prix. A la fin du livre, presque trente pages sont consacrées à la liste des pièces qui composent le musée créé par ce Monsieur Francis.
Oui mais voilà. Une nouvelle résidante arrive. C’est la panique à bord. Surtout qu’Anna Tap se révèle être beaucoup trop sociable et apprivoise même les esprits les plus secrets. Francis Orme fera tout pour la déloger.
Un roman hachuré, dans lequel on perd souvent pied, à l’image de l’équilibre ancestral de ces résidants, pulvérisé avec l’arrivée d’une seule personne.
Une cacophonie succède à l’harmonie, emplie des contradictions de la vie.

Sahkti - Genève - 50 ans - 15 juin 2004