Une histoire d'île, Tome 1 : Regarde donc l'Euphrate charrier le sang
de Yachar Kemal

critiqué par Tistou, le 11 juin 2011
( - 67 ans)


La note:  étoiles
Une histoire d’île – 1
Lire Yachar Kemal, c’est accepter de toutes façons de s’embarquer pour des contrées de nous peu connues, supputées et simplement imaginées à partir d’éléments tels « Les contes des mille et une nuits ». « Regarde donc l’Euphrate … » ne fait évidemment pas exception à la règle, de la même manière que sa manière de dérouler cette histoire ne fait pas exception à son style, à la fois épique et enfantin. Problème : ce qui passe pour un ouvrage de petite taille (« La légende du Mont Ararat ») et qui fait furieusement penser à une fable ou un conte, peut s’avérer moins digeste pour des ouvrages plus lourds, tel celui-ci. Il m’a paru en effet par moments long, long, avec même la frayeur de contempler le nombre de pages qui me restaient à lire (mauvais signe, ça !).
Il y est question d’une île, certes, mais aussi de redoutables conflits dont nous n’avons eu que peu l’écho dans notre Occident entièrement tourné vers son nombril : les guerres qui se sont déroulées début du XXème siècle dans les Dardanelles, le Caucase …
Yachar Kemal traite tout cela en même temps et ça m’a paru bizarre d’agréger tout ceci dans ce qui produit au bilan une histoire à la fois enfantine et byzantine.
Dans le cadre du Traité de Lausanne, en 1923, il est prévu d’évacuer nombre de populations qui ne sont pas au bon endroit ; des grecs en territoire turc et des turcs en territoire grec. C’est le cas de ces grecs vivant sur la paradisiaque Ile-Fourmi, qui n’ont rien demandé à personne et qui se voient brutalement contraints de tout abandonner, tout ce qui fondait leur vie. Exode et malheur. Pour tous les habitants. Sauf un, Vassilis qui a décidé de se cacher sur l’île, d’y rester, et de tuer le premier qui débarquera sur l’île. C’est que Vassilis est un des rares rescapés des conflits suscités et qu’il estime n’avoir plus grand-chose à perdre. Pour nous le prouver, Yachar Kemal fera quelques incursions dans le passé pour décrire l’horreur de ces guerres moyen-orientales.
Et puis un premier arrivant finit par débarquer, un turc évidemment, Poyraz Musa, à l’histoire personnelle pas piquée des vers, elle non plus. Et Yachar Kemal va longtemps s’amuser au cache-cache sur l’île entre ces deux là. Puis s’embarquer dans l’histoire récente de Poyraz Musa qui, il faut bien le dire, n’a pas grand rapport avec ce qui précédait dans le roman … D’où un sentiment de vertige et de perdition pour le pauvre Tistou qui a eu du mal, bien du mal à finir le roman !
En fait, il y aurait une suite … Pas sûr que …
Et pourtant il y a de très plaisants passages où tout l’amour de Yachar Kemal pour ces contrées transparait. Mais l’ensemble est par trop décousu.