Règlement de contes, tome 3 : Trois cochons
de Damien Marie (Scénario), Damien Vanderstraeten (Dessin)

critiqué par PPG, le 2 mai 2010
(Strasbourg - 48 ans)


La note:  étoiles
Une bédé décidément pas si bête...
C'est à travers la plume du jeune Normann Ribbs, 14 ans, l'un des trois frères cochon, que nous découvrons les premiers pas de sa famille sur le sol américain au milieu du 19ème siècle. Chassés d'Europe, ils connaîtront l'esclavagisme sur les terres du nouveau monde, découvrant au passage que la cruauté est également partagée par tous les hommes, d'où qu'ils soient. Trahis dès leur débarquement par leur "passeur" qui livrera Mme Ribbs à une mort affreuse, le clan Ribbs poursuivra son rêve de liberté avec bon nombre de leurs congénères. Normann s'opposera rapidement à son frère aîné Raff, tout puissant à la suite du décès de leur père. Leur vision quant à la philosophie de la ville qu'ils souhaitent bâtir pour être libres étant sensiblement différente. Déjà, leur frère Kid navigue indécis entre les deux. C'est en fuyant en solitaire dans la forêt que Normann rencontrera Mathéa, une jeune femme accompagnée d'un étrange énergumène, vieux sage aux rituels destinés à faire le lien entre la vie et la mort, dans le respect sacré de l'équilibre de la forêt. C'est que les hommes sont croyants, à l'inverse des cochons qui sont athées.

Ce troisième opus est celui du vécu des cochons, narré par Normann, futur shérif alcoolique de la ville de Pigtown. Difficile d'être en accord avec soi-même lorsque vos congénères, parfois de votre propre sang, s'oppose à vous violemment. Tâche rendue d'autant plus ardue qu'il faut également composer avec les "tribus" voisines (les loups et les hommes). Nous sommes donc les témoins de leurs interactions conflictuelles, avant que ne s'embrase la future Pigtown (tome 1 et 2), tenue par Naff, maire aux pleins pouvoirs dont on comprendra mieux les raisons de sa cruauté et de sa folie : l'envie de survivre par tous les moyens, mais à quel prix pour ses semblables.

Peut-être le meilleur des quatre tomes que compte la série. On y voit comment un équilibre peut être rompu par peur et méconnaissance de l'autre ; la dérive étant l'idéologie malsaine, réduisant à néant la culture de l'autre ; l'action devenant alors réaction et manipulation (et non plus construction et projection) ; la finalité devenant pour certains gloire, pouvoir et argent.

Une bédé décidément pas si bête...