Pour une poésie du dimanche
de Jan Baetens

critiqué par Sahkti, le 6 novembre 2009
(Genève - 49 ans)


La note:  étoiles
Dis-moi ton métier que je te dessine un poème
Démarche ô combien sympathique et instructive que celle de Jan Baetens, auteur et poète flamand d'expression française, qui s'intéresse dans cet ouvrage à ce qu'on appelle les poètes du dimanche, ces personnes qui écrivent de la poésie pour les petites occasions de la vie ou des textes qui ne seront jamais lu ou presque. Des poèmes écrits par des auteurs dont l'écriture n'est pas leur métier mais un passe-temps, un loisir comme un autre.
Est-ce pour autant que cette poésie vaut moins que celle des auteurs confirmés et des recueils de classiques ? Pas du tout ! Au contraire même, car en se rapprochant ainsi de la vie et du quotidien, cette poésie du dimanche se rapproche de l'homme et de l'existence. Il est bon et utile, parfois, que les mots renouent avec le quotidien et la réalité.

Se basant sur le fait que l'une des caractéristiques principales de cette poésie est que leurs auteurs n'ont pas de métier directement lié à l'écriture, Jan Baetens s'est penché sur une cinquantaine de personnages connus et a composé une mélodie poétique mêlant oeuvre et métier.
Drôle, passionnant et enrichissant. Jan Baetens jongle avec les mots pour leur faire dire l'ordinaire dans ce qu'il a d'extraordinaire. De l'amour du métier transparaît aussi celui de l'Homme et de la langue.
Il y a certes dans la liste des auteurs croqués des personnes dont le métier est en rapport direct avec la langue. Je pense par exemple à Georges Bataille, Francis Lalanne ou Maurice Grévisse. Mais la démarche de Baetens est de leur composer un métier poétique, de décliner leur profession sur fond de vers et de mots chantants.
Exercice intéressant, outre l'aspect ludique, car il permet non seulement de confirmer le talent de Baetens dans l'art de maîtriser cette poésie du présent, mais aussi d'inciter le lecteur de se frotter à l'exercice et de tenter lui-aussi de mettre sa profession en musique du langage.

Le sommaire de l'ouvrage:
AUTOPORTRAIT à cinquante ans
Georges BATAILLE, bibliothécaire
Lucien BECKER, préfet de police
Gottfried BENN, dermatologue
Stéphane BOUQUET, danseur & scénariste
Alfred BRENDEL, pianiste
René Guy CADOU, instituteur
Jean-Luc CAIZERGUES, machiniste d’opéra
Paul CLAUDEL, diplomate
Arthur CRAVAN, boxeur
J.V. FOIX, pâtissier
FRANQUIN, médecin
Maurice GREVISSE, grammairien
Bernard HEIDSIECK, banquier
François JACQMIN, R.P. des fonderies d’acier Cockerill-Sambre
Jim JARMUSCH, serveur
Moi JE (pseudonyme), universitaire
Abbas KIAROSTAMI, cinéaste
Francis LALANNE, chanteur-président de club de football
Jan LAUWEREYNS, chercheur en psychologie expérimentale
Javier LENTINI, proctologue
MAÏAKOVSKY, commissaire du peuple
MAO Zhe Dong (dit Mao Tsé Toung), homme politique
Henri MESCHONNIC, traducteur de A à – aha – …
Joseph NDWANIYE, infirmier
Paul NOUGE, chimiste
Jean PAULHAN, surveillant de jardin botanique
Charles PENNEQUIN, gendarme
Antonio PIZZUTO, Interpol
Le POETE INCONNU
Marc QUAGHEBEUR, directeur des AML
Jehan RICTUS, chansonnier-compositeur
Jacques ROUBAUD, mathématicien
Bernardo SCHIAVETTA, psychiatre
Wallace STEVENS, assureur
Christophe TARKOS, péagiste
Vincent THOLOME, animateur d’ateliers d’écriture
Jan TSCHICHOLD, typographe
Rudolph VALENTINO, acteur
Dominique de VILLEPIN, maître-nageur
ANONYMES, métiers inconnus