La Femme de midi
de Julia Franck

critiqué par Papyrus, le 26 octobre 2009
(Montperreux - 64 ans)


La note:  étoiles
un témoignage de l'intérieur
L'auteure de ce roman, Julia Franck, est née en Allemagne en 1970. L'histoire qu'elle raconte, traduite de l'Allemand par Elisabeth Landes, est celle d'une Allemagne d'avant guerre, d'abord dans un bourg reculé de Lusace, où se déroule l'enfance de deux petites filles dotées de parents atypiques, père militaire et mère déséquilibrée. Sur fond de grande crise économique, elle nous entraîne ensuite dans le Berlin des années 20 sur les traces de ces deux soeurs, Hélène et Martha, qui viennent y chercher travail, liberté et amour. l'Histoire s'accélère ensuite et c'est le destin d'Hélène, devenue Alice qui nous happe sur fond de guerre et de nazisme.
Le livre s'ouvre sur Peter, le fils d'Alice, abandonné sur le quai d'une gare: Qu'a-t-il pu se passer pour qu'une mère en arrive à cette extrémité?
Le roman est écrit avec minutie. La précision quasi chirurgicale de certains passages alterne avec des moments d'écriture minimaliste où l'essentiel est inscrit entre les lignes, dans les silences d'Alice, au travers d'un quotidien subi jusqu'à l'insupportable, où les prises de conscience sont à peine suggérées comme ce jour où elle se rend en forêt pour cueillir des champignons et qu'elle croise un train dont l'odeur la fait fuir...
Des sujets difficiles y sont abordés: la stérilisation des femmes qui ne sont pas considérées comme parfaites, être un allemand et avoir des origines juives, le sort peu enviable des femmes allemandes à l'arrivée de l'Armée Rouge ...
Combien de vies ont-elles ainsi été profondément marquées et bouleversées par le cours de cette guerre innommable, de l'autre côté de la frontière ? Julia Franck soulève un pan de ce rideau opaque sur les conséquences humaines dramatiques du nazisme dans l'Allemagne d'après guerre et dont les conséquences doivent exister encore aujourd'hui...
C'est un beau roman, bien écrit et bien traduit, qui m'a beaucoup séduite, parfois aussi rebutée mais que je ne regrette pas d'avoir ouvert car il fait partie des romans dont on garde longtemps l'empreinte dans ses pensées.
Au fait, Pourquoi ce titre ? Je n'ai pas vraiment trouvé...
Relecture de l'histoire d'une période sombre 7 étoiles

La femme de midi est un personnage mythique de la tradition populaire de la Lusace. Armée d'une faux elle s'en prend à ceux qui ne respectent pas la trève de midi lors des moissons : elle leur fait perdre la raison, qu'ils ne pourront retrouver qu'en passant au moins une heure à apprendre à filer le chanvre... Cette histoire est rapportée en détail dans une note page 123 de cet ouvrage.

Pourquoi cela a-t-il échappé à Papyrus ? Peut-être a-t-elle été déroutée, comme moi, par le style embrouillé de l'auteur, qui incite parfois à sauter des paragraphes, voire davantage, pour suivre l'intrigue... C'est d'ailleurs le défaut principal de ce roman, car son sujet est intéressant, même si les descriptions de la vie à Berlin entre les deux guerres me paraissent quelque peu artificielles, surtout quand on songe à l'âge de ce jeune auteur.

On nous explique que ce livre eut un grand succès en Allemagne. Sans doute les lecteurs ont-ils été sevrés de littérature "non-engagée" relative à cette période.

Tanneguy - Paris - 84 ans - 4 juillet 2010