Ah, il a fort à faire, le commissaire Montalbano, avec les deux femmes qui tournaient autour d’Angelo Pardo, le visiteur médical retrouvé abattu d’une balle dans la tête sur la terrasse de son immeuble, le sexe à l’air. Oui, d’entrée ça parait bien compliqué à Montalbano, d’autant qu’il se sent de plus en plus vieux, le brave commissaire. Et même à craindre de perdre la mémoire, à craindre Alzheimer.
Très vite quand même, elle parait bizarre la vie – et son train de vie – du visiteur médical. Et puis il y a Michela, la sœur d’Angelo, celle qui a incité Montalbano à la suivre chez son frère qu’elle considérait comme disparu et qui a fait que Montalbano découvre le corps. Possessive, autoritaire, est peu dire. Mais le fonctionnement entre frère et sœur est spécial lui aussi, entre compte bancaire commun et surveillance étroite du frère par la sœur, notamment de sa relation avec Elena, sa maîtresse coûteuse.
Mais le fonctionnement d’Elena va passablement interloquer Montalbano là encore : poussée dans les bras d’amants par son mari, impuissant, qui exige de tout savoir de la relation (où, quand, comment), la dite Elena est, elle aussi, un animal bizarre :
« Et pourquoi une nouvelle relation avec un autre homme aurait-elle pu créer des équivoques ? La réponse à la question, il l'eut en croisant son regard. Ce n'était pas une femme qui était assise dans le fauteuil devant lui, c'était un guépard femelle au repos, encore repu mais qui dès qu'elle sentirait les stimulus de l'appétit, sauterait sur la proie repérée depuis longtemps. Laquelle proie était lui, Montalbano Salvo, tremblant et maladroit animal domestique qui jamais au grand jamais ne réussirait à courir plus vite que ces très longues jambes, pardon, pattes qui pour le moment restaient croisées, dans une pose enchanteresse. Et constatant, plus antipathique que tout autre, une fois aganté par ces dents, une fois qu'il commencerait à être dégusté, il apparaîtrait sûrement fade pour les goûts de la guéparde, et décevant dans le récit que la guéparde ferait ensuite à son professeur de mari. »
Personne n’en doute, entre deux dégustations de cuisine sicilienne dont Andrea Camilleri nous régale, Montalbano détricotera tranquillement les fils de l’intrigue. Considérant que deux hauts personnages politiques locaux mourront au même moment de consommation de produits illicites, on ne s’étonnera pas qu’une organisation typiquement sicilienne traîne aussi par là, qui pourrait bien avoir, ou avoir eu, un rapport avec Angelo Pardo …
Ah, cette Sicile qui nous devient de romans en romans (d’Andrea Camilleri) toujours plus familière !
Tistou - - 68 ans - 3 janvier 2012 |