L'Hygiaphone
de Didier Bourda

critiqué par Sahkti, le 5 février 2009
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Un écho à notre Histoire
Il y a... toute une série d'événements, micros ou non, que l'auteur liste. Pour commencer. Puis il y a des événements qui sortent la tête de l'eau et commencent à nager, à balbutier, à raconter quelque chose. Avec l'aide du lecteur.
Il y a alors des histoires qui se créent, qui s'envolent, qui parcourent les pages pour en raconter d'autres. Chaque fragment est un écho à quelque chose et donne naissance à d'autres lignes.

"Il y a quand la BMW jaune a traversé le carrefour avec Apocalypse en lettres stylisées sur le pare-brise arrière.
Il y a quand un enfant fut indemnisé pour être né handicapé.
Il y a quand la chirurgie in-utéro sera devenue monnaie courante.
Il y a quand un plombage fut à l'origine des cinq fausses couches de Lydia.
Il y a quand cette jeune femme a dit Fais-moi l'amour au lieu de
Baise-moi, le film de Virginie Despentes et Coralie Trinh Tih.
Il y a quand la jument mit bas à vingt mètres du balcon.
Il y a quand Geneviève Kaufmann se rendait à Beyrouth à Noël.
Il y a comment Geneviève Kaufmann se rendait à Beyrouth à Noël.
Il y a pourquoi.
Il y a où : Beyrouth.
Il y a quand François Léotard parlait d'Israël et de la Palestine avec un pansement sur le front.
Il y a quand un Occidental en short visite une mosquée à Tripoli.
Il y a quand sa femme l'accompagne en djellaba obligatoire.
Il y a quand Charles Dick parlait de Gilles Deleuze et Kostas Axelos sur sa terrasse à Byblos.
Il y a quand il parlait du souk des bijoutiers et de la baie de
Jounieh : Bétonnez ce que vous voulez, ce que je veux c'est un projet pour l'homme.
Il y a quand il est retourné enseigner au Liban."

Jeux plaisants, vives réparties sur les mots et les idées. Didier Bourda jongle avec tout cela. L'exercice pourrait s'arrêter là mais il n'en est bien sûr rien, car à travers ces montages et ces rebondissements, c'est notre monde que Didier Bourda décrit, qu'il soit vu par le petit bout de la lognette, par l'écran d'une télé ou par le regard aveuglé des grands de ce monde. Dès lors, nous nous plaçons dans la ligne de mire d'un sniper récurrent et nous nous exposons.
La beauté des mots ne rend leur signification que plus forte et nous interpelle sur notre condition. Qui sommes-nous au milieu de tout cela?


http://atelieragneau.free.fr/hygiaphone.doc