Miradors de l'abîme
de Horia Badescu

critiqué par Sahkti, le 26 décembre 2008
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Apprendre le monde
Né en 1943, Horia Badescu est un auteur roumain fécond à qui l'on doit des essais, des romans, de la poésie et des ouvrages de critique littéraire et sociologique.
Le français est pour lui une seconde langue qu'il aime disséquer et explorer; c'est dans ce langage qu'il a rédigé les poèmes du présent recueil. Mission délicate mais ô combien enrichissante lorsqu'on connaît les difficultés de la langue française, en particulier pour définir le sens de certains termes. Badescu s'est plié à l'exercice, avec succès, et il a pu saisir toutes les subtilités du langage pour décrire avec justesse les errances qui sont celles de ses mots et de ses poèmes.

Textes courts et incisifs, ces fragments posent la question du sens de l'univers et de nos vies, interrogent le monde sur son devenir et ses raisons d'être, sur notre place au milieu de tout cela. De multiples interrogations qui ne sont pas sans faire naître une certaine inquiétude, proche parfois de la peur.

"Si brève la durée,
si longs les jours...
Sur des chemins sans retour
jusqu'au bout.
Et alors?
Qui gagne aux jeux de dés
la chemise de cendre?"
(page 23)

Mais pour mieux appréhender ce destin qui est le nôtre, ne vaut-il pas mieux d'abord faire sa connaissance? Rien de mieux pour ce faire que l'utilisation des mots, eux qui nous mèneront jusqu'au bout du chemin, jusqu'à l'ultime grand saut et nous poursuivront encore au-delà, dans tout le poids du silence.

"Un sorbier:
seul,
seul avec le ciel, le vent
et soi-même.
Un sorbier qui de lui seul
se souvient;
de lui seul, du ciel
et du vent:
de l'oubli il ne garde
que la mémoire
de rien"
(page 50)

Une poésie à mi-chemin entre l'initiation et l'enseignement, à savourer par fragments pour en retirer toute la richesse et méditer longuement sur les pensées de Horia Badescu, brillant poète.