Ashby suivi de Sur un cheval
de Pierre Guyotat

critiqué par Débézed, le 20 octobre 2008
(Besançon - 77 ans)


La note:  étoiles
« Le mal était une nécessité »
« Notre vie était une continuelle invention de plaisirs nouveaux ». Dans un château aux confins de l’Ecosse et de l’Angleterre, Angus et Drussilla, jeunes adolescents, découvrent les émois de l’amour et les premiers frissons de la chair. Et, après une séparation imposée par la guerre, Angus, devenu Lord Ashby, épouse Drusilla et mène dès lors, avec elle, une vie de plaisir et de luxure au milieu de leurs domestiques contaminés par cette perversion. Mais, Drusilla se lasse vite des amours conjugales et, avec la complicité de son époux, cherche de nouvelles émotions aux contacts de jeunes éphèbes qui fréquentent la maison jusqu’au jour où le bien refuse de se laisser corrompre.

« Sur un cheval », le texte polyphonique qui complète ce livre est construit autour de personnages figurant déjà dans Ashby, notamment le beau Roger qui résiste à la tentation que lui inflige quelques jolies filles qui lui offrent leur corps qu’il repousse, car

« Moi je ne veux rien que vivre
Et je traverserai la vie sur un cheval »

Jusqu’au jour où, en Irlande…

Ces deux textes complémentaires, d’un romantisme exacerbé, constituent une ode à la sensualité et à la volupté qui peuvent basculer jusqu’à la transgression et à la perversité sans jamais sombrer dans un érotisme vulgaire. « Il n’y avait aucun calcul dans notre vie, mais bien plutôt une spontanéité féconde, une préméditation inspirée. Le mal était une nécessité. Notre hypocrisie un déguisement élémentaire, un exercice toujours plus gai. » Et, c’est ainsi que le roman devient une parabole de la lutte du cœur contre le corps, du bien contre le mal et de Dieu contre le diable.

Sous la plume de Guyotat cette parabole devient sensuelle et voluptueuse tant son écriture, construite à base de phrases courtes est légères, aériennes et fluides comme le contour de la hanche d’une jeune fille à peine sortie de la puberté. C’est un romantisme un peu vieille Europe, c’est Radiguet buvant un verre avec Schnitzler dans une Weinstube du côté de Mayerling.