Le plongeon
de Olivier Delorme

critiqué par Spiderman, le 25 juillet 2008
( - 61 ans)


La note:  étoiles
Plongeon vivifiant
Le plongeon, que Patrick Poivre d'Arvor avait présenté dans « Place aux livres » sur LCI en août 2002 vient enfin de ressortir en édition de poche.
C'est un vrai plaisir que de pouvoir s'offrir pour à peine plus de huit euros (moins cher qu'une entrée dans certaines piscines !) un plongeon humain, vivifiant et revigorant d'une telle richesse !
De vrais caractères (sans anglicisme !) sur une île-volcan, rocher fumant du Dodécanèse, à un « crachat » de la Turquie :
- Un couple d'hommes dont l'un est le géniteur du jeune garçon qui les accompagne,
- Un archéologue en bois d'Olivier,
- Une autrichienne au passé obscur et au patronyme évocateur,
- Le ballet du Poséidon Express et de l'Apollon Express,
- Du Campari à l'eau de Seltz et du galaktobouriko,
- Un ancien protégé de la mère de S.A. Sofia, reine d'Espagne,
- Une bouteille de vitriol,
- L'autochtone séduisant et le Grec de l'exil,
- Une mère sous antidépresseurs,
- Des bandes rivales de canards, mais aucun raton laveur...
Dans une construction chronologique décalée et agréable à suivre, avec ses instruments d'archéologue, Olivier Delorme explore méticuleusement les vestiges dlieu depuis lequel les anciens occupants de l'île plongeaient suivant un rituel précis.
Avec sa documentation d'historien, il nous éclaire sur certains aspects de la guerre civile grecque et de la seconde guerre mondiale... sans oublier le passé et les amours grecs.
Avec son amour de la Grèce, il nous fait vivre au rythme de ce microcosme qu'est une île grecque, si loin du pays-continent-archipel, et si proche du pays « rival ».
Avec ses convictions, il nous entraîne dans une réflexion passionnante sur un monde sans monothéisme, moins chargé d'absolutisme moral et de discriminations.
Avec son hédonisme, il nous fait partager une infinité de plaisirs sensuels, de joies physiques et intellectuelles.
Mais le mystère r(h)ode(s) et c'est une intrigue captivante qui saisit le lecteur dès le premier chapitre ... et le mène au long de routes sinueuses du port aux lèvres du cratère, du cafeion au village de vacances, du monastère à la falaise, de "l'olivette de la veuve pendue" à la discothèque.
Nul ne sortira indemne de l'aventure : chacun va effectuer sa mue, son katapontismos, son plongeon personnel d'une vie à une autre ... et pour l'un d'entre eux ce rite de passage prendra la forme d'un accident qui le laissera paraplégique...
Petit reflet du sens profond et subtil de la réflexion d'un auteur pourfendeur de tous les clichés, au moment où la photographie numérique transforme tant de vacanciers en aveugles paparazzi de l'inutile, ce court extrait (p. 239) : « En cessant de me croire obligé de photographier, j'ai cessé de me croire obligé de lire tous les livres, d'avoir quelque chose à dire ... ou de me sentir coupable parce que je n'en pense rien. Je n'avais plus de compte à rendre, ni aux copains, ni aux parents, ni à Dieu ... »