Absurdement présenté comme un « thriller » par son éditeur, « La fenêtre jaune » est en fait un passionnant roman de science-fiction qui aurait pu trouver sa place au milieu des romans que Brussolo a écrits pour la collection Anticipation de Fleuve Noir dans les années 80. Un texte court et efficace, mais qui a aussi l’intelligence de décrire avec assez de détails tout un système complexe tout droit sorti d’un imaginaire débridé sans limites évidentes. Certains des commentateurs précédents semblent avoir été insatisfaits de la « rapidité » avec laquelle le roman se termine. Pour ma part, même si je regrette cette rapidité, car ce roman fait partie de ceux qu’on a envie de lire plus longtemps (les bons romans sont toujours trop courts), je ne trouve pas du tout cette fin mauvaise. L’auteur se permet même au tout dernier chapitre un clin d’œil et un magnifique pont vers son œuvre destinée à la jeunesse. Ce qui est déjà présent en filigrane dans le reste du roman car Cassie, l’héroïne de « La fenêtre jaune » est romancière pour enfants. D’ailleurs, je m’amuse à percevoir dans ce roman plus d’une confidence de l’auteur sur son statut d’écrivain pour enfants, la manière dont cela est généralement perçu par les adultes et son rapport avec ses jeunes lecteurs qui n’est forcément pas sans lien avec la rapport particulier qu’entretient Brussolo avec l’enfance en général et la sienne en particulier. Seul ceux qui auront terminé « La fenêtre jaune » comprendront ce qui suit : il y a de l’émotion quand Cassie voit sous ses yeux grandir de manière accélérée ceux à qui elle a raconté des histoires… J’ai dans l’idée que Brussolo rêverait aussi que ses jeunes lecteurs restent des enfants avec leur capacité d’émerveillement non encore entachée par la rationalité des adultes… Dernière chose, ce roman m’a remis en mémoire un grand roman de la science-fiction anglaise, « Le monde inverti » de Christopher Priest. Je ne sais pas si ce dernier a inspiré Brussolo, mais une analyse combinée en profondeur des deux romans, de leur mécanique narrative serait plus qu’intéressante. D’une certaine manière « La fenêtre jaune » est le récit inverse de celui du monde inverti. Le premier raconte l’histoire d’un personnage qui entre dans un « vaisseau », un monde clos en mouvement… dans l’autre on racontait l’histoire de quelqu’un né à l’intérieur de « vaisseau » qui découvrait le monde extérieur… A l’instar de son hypothétique modèle, ou de son roman frère involontaire, « La fenêtre jaune » est un roman absolument passionnant qu’il est très difficile de ne pas lire d’une traite.
ArzaK - - 46 ans - 25 septembre 2008 |