On Competition
de Michael E. Porter

critiqué par Saule, le 29 juin 2008
(Bruxelles - 58 ans)


La note:  étoiles
Larzac, c'est où ?
Ce gros livre rébarbatif est ce qu'on appelle un "text book". La théorie de Porter date des années 1980 et son succès ne s'est jamais démenti, sa théorie est restée depuis la référence principale des étudiants, des consultants et des stratèges qui s'agitent dans le petite monde des affaires.

Alors que nous dit ce bon Porter, du haut de sa chaire de la Harvard Business School ? Je vais essayer de vous résumer cela en quelques lignes (le principe de base est très simple). Tout d'abord, pour choisir la stratégie adaptée à la boite dont vous êtes le CEO (Chief Executing Officer, le type tout au dessus qui empoche les gros bonus), il vous faut analyser la structure de la compétition de l'industrie. En utilisant son fameux modèle des cinq forces (les cinq forces : les fournisseurs, les acheteurs, les barrières à l'entrée, les substituts, les entreprises concurrentes dans l'industrie elle-même) vous serez à même de choisir une des stratégies génériques que Porter vous propose : stratégie des coût bas ("low cost"), de différenciation ("product differentiation"), de focus.

La seconde grande contribution de Porter à ce petit monde de la stratégie et des théories des avantages compétitifs, c'est sa fameuse notion de "value chain" : il s'agit de décomposer les activités de la firme génératrice de valeur pour le consommateur final. Ça c'était un coup de maître car depuis son modèle de "value chain" est mis à toute les sauces et fait le bonheur des consultants qui en mettent plein la vue des gens comme vous et moi qui travaillent dans la vie réelle !

Un avis objectif : la théorie de Porter est simplificatrice (ce qui n'est pas nécessairement un mal), elle est suffisamment générale pour qu'on puisse trouver une parcelle de vérité dans tout les cas de figure. En outre cela a le mérite de tenter de formaliser les choses et il explique bien des concepts assez intuitifs. Et puis c'est un grand terrain de jeux pour les "business schools" et les consultants de tout bord, et cela permet aux types très bien payés tout en haut de l'échelle de justifier leur salaire en "produisant" quelque chose.

Un avis subjectif : je ne crois pas au modèle de Porter ni à aucune des nombreuses théories qui pullulent dans le domaine des "business strategy". Pour moi les sociétés qui marchent (qui gagnent beaucoup d'argent, puisque c'est le seul critère), ont du succès pour une raison qui n'a rien à voir avec une quelconque stratégie : c'est simplement le hasard et/ou le fait d'être là au bon moment. Je ne crois pas du tout au chef d'entreprise génial qui a une vision stratégique. Bien sur il y a des cas (Bill gates avec Microsoft, Steve Jobs avec Apple), mais pour quelques réussites il y a des millers d'autres dont on ne parle pas ou qui invalident les théories (récemment le chef de Fortis, la plus grosse banque Belge, qu'on acclamait il y a trois mois pour sa géniale stratégie d'expansion par le rachat d'un concurrent hollandais, et qui maintenant est vilipendé pour avoir coulé sa banque en bourse !). D'autre part je trouve ces modèles de compétition amoraux, mais évidemment c'est le modèle capitaliste lui-même qui est amoral. On vit dans un monde triste, dans lequel des gens a priori intelligents passent leur temps à essayer de détruire des concurrents, de manipuler les consommateurs, de produire plus à moindre cout, tout cela au détriment de toute considérations morales et dans le but de gagner plus d'argent, l'argent qui est notre Dieu et Maître à tous.

Je ne vous conseille pas de lire ce livre. Ce n'est pas ça la vraie vie !