Josefine Mutzenbacher : Histoire d'une fille de Vienne racontée par elle-même
de Anonyme, Josefine Mutzenbacher

critiqué par Bolcho, le 29 avril 2008
(Bruxelles - 75 ans)


La note:  étoiles
Eloignez les petits !
Cette « Histoire d’une fille de Vienne racontée par elle-même » a paru sous le manteau en 1906 et a sans doute servi de mine d’informations pour les boutonneux de l’époque.
De ses cinq ans à ses treize ans, Josefine Mutzenbacher y raconte la vie sexuelle particulièrement débridée qui lui a ouvert la voie de la prostitution.
On a là une sorte de relevé des positions, activités diverses, techniques sophistiquées ou non, variantes à deux ou plusieurs personnages de sexes divers, le tout raconté avec de l’humour et une immense bonne santé. S’il n’y avait l’âge de l’héroïne qui donne à l’ensemble une coloration un rien sulfureuse, on aurait un manuel d’érotisme (ou de pornographie, comme vous voudrez, c’est un autre débat) assez guilleret. Il faut, par exemple, souligner que le plaisir féminin est mis au centre des ébats, ce qui est finalement très moderne.
Bien sûr, raconter des coïts à la suite les uns des autres est un exercice littéraire assez particulier. L’ennui pourrait naître de la répétition. L’auteur sauve l’ensemble grâce à un humour constant.
Les noms qu’il donne aux organes-vedette en font partie. A chaque fois, on y trouve un clin d’œil qui rappelle la situation particulière ou la profession du monsieur. Avec un épicier, il sera question de la rencontre entre la figue et le hareng sec. Quant à lui, l’instituteur va manier son bâton de craie, vous l’aurez deviné. Ailleurs, c’est la carotte qui est plantée dans le jardin, ou alors, on parle de « descendre et remonter la corde jusqu’à faire arriver l’eau du puits ».
Mais c’est sans doute les scènes à la gloire des hommes d’Eglise qui m’ont le plus mises en joie, je ne sais pas du tout pourquoi. Le vicaire et sa crosse. Ou encore le chanoine vociférant que « C’est le marteau de la Grâce qui te frappe (…) je vais t’oindre ».
A propos d’un vicaire précisément, dont Josefine raconte qu’il fut condamné à une lourde peine pour ses actes impudiques, elle trouve « qu’il ne méritait pas ça » dans la mesure où « il n’y avait plus grand-chose en nous qu’on pût pervertir ». Non, décidément, malgré ses déclarations pieuses ici ou là, je ne suis pas sûr que Josefine ait tout fait pour améliorer l’image de l’Eglise…

Elle nous explique pourquoi son récit s’arrête lorsqu’elle a treize ans, et son explication est imparable :
« Si l’on songe que l’on compte 365 jours, avec une moyenne prudemment évaluée de trois hommes par jour, cela en fait tout de même onze cent dans l’année, soit trente-trois mille sur trente ans. C’est une armée. On ne saurait donc attendre de moi que je rende compte ici de chacune de ces trente-trois mille baïonnettes… »

Texte anonyme mais qui est aujourd’hui attribué à Felix Salten, un auteur prolixe, familier d’Arthur Schnitzler, de Gustav Klimt et correspondant de Freud.
Celles et ceux qui auraient vu le « Bambi » de Disney sont priés de se souvenir de la scène la plus pornographique qui s’y trouve. Rien ? Comme c’est bizarre : Félix Salten est l’auteur du livre célèbre dont Disney a acheté les droits pour son film.