Le bourreau et son double
de Didier Daeninckx

critiqué par Shelton, le 23 avril 2008
(Chalon-sur-Saône - 67 ans)


La note:  étoiles
Très bon roman noir avec Algérie en toile de fond...
Didier Daeninckx est un auteur engagé de romans noirs, parfois plus tendres, qui n’hésite pas à utiliser le roman policier, voir le polar, pour faire passer des messages politiques. Il a, ainsi, créé un inspecteur de police atypique, Cadin, qui se fait jeter d’un peu partout et qui atterrit là où l’écrivain en a besoin pour défendre son thème, son idée, son sujet…
Un jour, donc, Cadin se pose à Courvilliers en Seine-Saint-Denis. Comme il arrive avec une grande pancarte dans le dos, ce flic est un poison et un attire-m…, il se retrouve à s’occuper des nuits et la nuit, à Courvilliers, il n’y a que des ennuis à récolter par milliers…
Un meurtre et un suicide conjugués, voilà le programme de la première nuit avec un inconnu qui fuit l’immeuble concerné, une voiture qui fonce dans la nuit et des habitants du quartier qui regardent la police de façon suspecte avec aucune envie d’aider à la recherche de la vérité…
Le roman est écrit de deux façons différentes. D’une part le policier qui se déroule dans les années quatre-vingt, avec une ville moderne, un quartier très chaud et une grosse entreprise dotée d’un service d’ordre très musclé et parfaitement organisé… D’autre part un récit qui se passe en Algérie au cœur de la guerre et de ses atrocités. On y retrouve des appelés piégés et englués dans la torture, des êtres humains brisés qui n’ont aucune chance de survivre… On se doute bien que les deux récits vont se rencontrer, se croiser… et que nos appelés d’hier vont se retrouver dans le roman policier d’aujourd’hui… Qui aura survécu ? Dans quel état le retrouverons-nous ? A quel poste ? Policier, milicien, politicien, chef d’entreprise ? C’est une des forces de ce roman que de jouer avec le lecteur et de ne nous laisser aucune chance, avant les dernières pages, d’identifier ces militaires d’hier pour les retrouver dans les acteurs contemporains…
Cadin est égal à lui-même et il est même de plus en plus sympathique et décalé. Manœuvré par son patron, les journalistes, les responsables de la société Hotch… et pourtant il est plutôt clairvoyant et efficace…
J’ai beaucoup aimé ce petit roman policier qui devient, assez rapidement, un bon roman voir un bon texte politique et engagé comme sait nous les offrir Didier Daeninckx.
Les victimes du meurtre, du suicide ? Claude Werbel et sa femme Monique ? Ce qui est certain c’est qu’il travaillait chez Hotch et qu’elle avait posé nue avec des photos qui avaient bien circulé… Mourir pour des clichés nue ?
Un très bon roman qui s’avale d’une seule traite et qui peut satisfaire les amoureux des polars, les chercheurs de romans forts et noirs (c’est quand même pas rose !) et, enfin, les lecteurs de pamphlets engagés contre certaines pratiques militaires en Algérie…