Dans la nuit Mozambique
de Laurent Gaudé

critiqué par Aaro-Benjamin G., le 3 décembre 2007
(Montréal - 54 ans)


La note:  étoiles
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Passé inaperçu au début de l’été 2007, ce recueil – comme tout ce que Gaudé écrit – mérite un coup d’œil. Un regroupement de quatre textes, masculin, rude, violent, d’où émane la lassitude chaude de l’Afrique et les senteurs des écumes de mer, sauf pour la nouvelle mélancolique dissonante « Gramercy Park Hotel », située à New York, relatant les sentiments d’un vieillard pour une ancienne flamme. Que fait-elle là?

Celle qui donne son titre au livre représente parfaitement le thème sous-jacent. Quatre hommes se réunissent autour de la table et se racontent les grands moments de leurs voyages. Le récit du commandant Passeo – un lynchage non expliqué sur son bateau - est particulièrement captivant mais souffre d’une absence de finalité. La même constatation est faite pour « Sang négrier » - une fantastique chasse à l’homme dans le port de Saint-Malo marquée par une malédiction digne de Poe - dont la chute nous laisse sur notre faim. Enfin, « Le Colonel Barbaque » - le témoignage d’un traître ayant trouvé sa place au sein de l’ennemi, est un hommage prenant au continent noir, sans plus.

On meurt beaucoup dans les histoires de Gaudé. On se fond dans la nature, redevient animal et se mélange à la terre. Les personnages principaux cherchent leur voie, sont fiers et toujours réalisent à quel point ils sont fragiles. Le talent de raconteur de l’auteur est indéniable. Les phrases sont simples mais rondes et pleines de signification. Toutefois ici, il est dommage que l’on nous offre cette belle prose dans une collection un peu bâclée. Des aventures frustrantes comme des promesses non tenues.
Ou la complexité du cerveau... 6 étoiles

Quatrième de couverture :

"Le sang négrier", "Grammercy Park Hotel", "Le colonel Barbaque", "Dans la nuit Mozambique" : quatre récits qui explorent la culpabilité, la violence et les souvenirs... De New York à Saint-Malo, de l'Afrique au Portugal, qu'ils soient poètes, esclaves, soldats ou marins, les personnages tentent d'échapper à la fatalité. Le talent de conteur de Laurent Gaudé fait merveille, mêlant magie noire, guerres destructrices et histoires d'amour, avec, toujours, en arrière-plan, la mer et l'ombre entêtante de l'Afrique.


Mon avis :

Je ne suis pas friande de nouvelles, cependant, celles-ci se sont laissées dévorer sans laisser une miette.

Le thème : La conscience, la mémoire, l'état psychologique. Ce phénomène qui fait que le cerveau même si on n'en est pas conscient sent que la limite est franchie, et fait que nous débloquons.

Entre celui qui se rend compte qu'il a tué inutilement un homme et que cette mort le poursuit

Celui qui sent sa fin proche et revoit sa vie en laissant affleurer ses regrets

Celui qui a été rongé par la barbarie de la guerre et comprend à son dernier instant la stupidité de son comportement

et ceux qui ont besoin de se remémorer certains passages de leurs vies pour vivre heureux


on se rend compte que l'être humain c'est une machine très complexe.

Mcchipie - - 47 ans - 4 juin 2012


Des histoires sans fin... mais avec de bons débuts 7 étoiles

Je n'ai lu que Sang Négrier et Dans la Nuit Mozambique, car les deux autres nouvelles n'étaient pas présentes dans le petit recueil de 2 récits que j'avais entre les mains l'autre jour.
Gaudé est indubitablement très bon conteur, et le lecteur ne doit pas se faire de souci, il sera emporté dans l'histoire.
Quelle dommage que ces deux histoires se terminent... par le néant.

Rien. C'est fini. Mais... les réponses aux mille questions qu'on se pose ? Comment se fait-il que... ? Qui est réellement... ? Par quel malheur ce personnage est-il... ?
Non. Pas de réponse. On n'aurait bien aimé savoir... ça, Monsieur Gaudé, vous ne l'emporterez pas au Paradis !

Merci quand même pour les bons moments passés.

Martin1 - Chavagnes-en-Paillers (Vendée) - - ans - 19 janvier 2012


Les Douceurs de l’Apocalypse ! 10 étoiles

« Dans la nuit Mozambique » est un recueil de 4 nouvelles écrites entre 2000 et 2007 .
On y retrouve l’écriture flamboyante de son roman Goncourt « Le soleil des Scorta ».
Une écriture lumineuse , des personnages forts , des émotions intenses et des images qui jaillissent. Laurent Gaudé est sans conteste un grand écrivain.
L’auteur nous embarque dans les noirceurs de l’âme humaine ou violence , passion , culpabilité parviennent à côtoyer de petits moments de bonheur.

Sang négrier :
5 esclaves noirs , embarqués sur l’Ile de Gorée , s’échappent d'un navire à quai à St Malo.
S’ensuit une traque ( une battue ) pour retrouver et châtier les évadés. Mais ils ne parviendront pas à reprendre le dernier qui semble se jouer d’eux.
Violence , vengeance aveugle , lynchage . Des actes qui saliront à jamais l’âme du commandant , rongé par le remord.

Gramercy Park Hôtel :
Moshe S.Cravicz est au crépuscule de sa vie quand il est violemment agressé au bas de son immeuble.
Acte qui lui fera dérouler sa vie et se souvenir de son unique Amour, Ella, et de leur mariage à Gramercy Park Hotel.
Un récit sensible sur la nécessité de vivre l’instant présent.

Le Colonel Barbaque :
Quentin Ripoll est « psychologiquement mort » dans les tranchées de la Guerre 1914-18.Il est fatigué d’avoir tant tué.
Il doit la vie à M’Bossolo – soldat africain – qui mourra de la grippe espagnole.
Révolté de constater que les nègres meurent dans l’indifférence pour une guerre qui ne les concerne pas.
Il quitte femme et enfants pour rejoindre l’Afrique et étancher sa soif de « hyène qui s’ennuie lorsqu’elle ne tue pas ».
« Le ciel est vide » se complait à dire Quentin , désormais surnommé Colonel Barbaque par ses frères africains.
Un récit fort , poignant.

Dans la nuit Mozambique :
Amiceto de Medeiros , Fernando Pimenta , Manuel Passeo et le Contre-amiral Da Costa se réunissent régulièrement dans le restaurant de Fernando pour « raconter des histoires ».
Celle de « la fille de Tigirka » résonne en eux avec acuité.
« C’est comme déguster les Douceurs de l’Apocalypse » ( choux à la crème ) dira Fernando.
Un voyage sur les côtes du Mozambique de Beira à Maputo . Trafic de marchandises et d’hommes… avec son lot de pertes.
Récit poignant empli de dureté et d'une belle amitié d'hommes.

A consommer sans modération !

Frunny - PARIS - 58 ans - 27 octobre 2011


Au seuil des ténèbres 7 étoiles

Bien que peu friand de nouvelles, j’ai découvert ce livre par hasard et je ne le regrette pas. Laurent Gaudé a un véritable talent de conteur, et ces quatre récits sur des hommes très différents au crépuscule de leur vie, à différentes époques, nous touchent par leur humanité et leur sensibilité. Des histoires à la limite du fantastique où les êtres disparus, tels des fantômes, continuent à exister parmi les vivants qui les ont à un moment côtoyés, que ce soit à travers leur haine, leur amour ou simplement leur aura…

Blue Boy - Saint-Denis - - ans - 18 juin 2008